Mon CV : qu’est-ce que je dis de moi ?

On pourrait croire que faire un CV c’est rapide et facile. Quelques informations de dates, d’entreprises, de postes occupés et de contenus de fonctions, et le tour est joué. Alors pourquoi remettre souvent à plus tard ? Pourquoi se demander ce qu’il faut choisir comme informations ? Comment faire pour se démarquer ?

Cet article a été publié il y a 3 ans, 7 mois.
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CV : qu'est-ce que je dis de moi ?
Au-delà d'être un reflet de votre personnalité, votre CV est un outil qui doit attirer l'oeil des recruteurs.

Parler de soi n’est pas un sujet si simple. Mais voilà, le monde professionnel évolue, en permanence. Il sollicite, en plus du savoir et du savoir-faire, le fameux savoir-être. Est-ce nouveau ? Pas vraiment. Et pourtant, certains font encore passer les « soft-skills » – compétences comportementales – pour un sujet de découverte. Est-ce ancré ? Pas encore, et loin de là. Car le statut qu’accorde le savoir est lui, bien ancré dans nos modes de perception, d’évaluation, de relation.

Alors quand il s’agit de rédiger un CV, pour une recherche de poste, pour un projet, pour une mobilité interne : le casse-tête.

Il est vrai que les systèmes de gestion de candidatures évoluent. La boîte à CV s’est transformée en base de données. Et ? L’outil a évolué, mais le message reste un sujet. L’outil ne règle pas tout, malgré de nombreux fantasmes. Ce serait si simple.

A quoi sert mon CV ?

Avant tout, à parler de moi. Et là, ça commence à tanguer.

Il sert avant tout à dire à votre lecteur qui vous êtes quand vous êtes en situation professionnelle. Il dit comment vous occupez votre poste, comme vous participez à votre environnement.

Le CV est un outil pour analyser votre parcours, vos expériences. Sa rédaction, sa construction, vont vous permettre de prendre du recul sur vos réalisations, pour en restituer une vision.

Le CV n’est donc pas uniquement un outil chronologique ? Ce serait le réduire à un outil de forme. Il est plus intéressant de vous questionner sur la construction du message, plutôt que sur la taille de la marge, les couleurs qui vont bien pour se faire repérer, ou le style de la police.

Votre CV est avant tout votre outil de communication. Il se construit comme un article : qu’allez-vous dire du sujet ? Quel sera votre éditorial ? Le rapprochement avec l’univers journalistique permet de comprendre l’enjeu du CV. C’est vous exposer dans vos opinions de votre parcours, par le regard que vous  portez sur vos expériences. Un même évènement sera abordé d’autant de façons qu’il y a de publications de presse.

Mon CV : le « comment » au-delà du « quoi »   

On pourrait parler de CV fonctionnel, et de CV de posture.

Gardons le lien avec l’univers journalistique, et prenons comme sujet les élections américaines prochaines, histoire de s’extraire un instant du COVID.

Un article fonctionnel décrirait l’élection par le calendrier, par la mécanique du vote, par le contenu du mandat…Un CV fonctionnel décrit le contenu de la fonction, les activités du poste. Ce qui est commun entre les deux situations ? Le document donne des informations connues, ou, si elles ne le sont pas, des informations disponibles facilement.

Un article d’opinion va permettre à son rédacteur de diffuser son avis sur les enjeux de l’élection, sur le moment particulier auxquelles elles interviennent, sur la posture des candidats. Ce sera l’occasion d’exprimer l’angle sous lequel elle considère les élections.

Un CV de posture va vous permettre de choisir les sujets de votre parcours sur lesquels vous souhaitez mettre l’accent, la façon dont vous allez valoriser telle expérience, tel projet, telle responsabilité. Un CV de posture vous invite à réfléchir à qui vous êtes en situation professionnelle, au-delà de ce que le poste que vous occupez vous amène à faire. Il vous sollicite sur la façon dont vous occupez votre poste, sur le « comment », plutôt que sur le « quoi ».

Ça paraît compliqué ? En fait, non. Juste un peu de temps, se poser, réfléchir. Pour quoi au final ? Pour vous différencier, pour vous positionner, pour rencontrer les interlocuteurs qui vous correspondent, pour rejoindre l’entreprise ou l’organisation qui vous convient. Pour être satisfait, juste ça.

Exemple : un CV de fonction RH

Prenons un exemple : un CV de fonction RH. Le CV fonctionnel parlerait de «définir et piloter les stratégies et politique RH en accord avec sa direction – Encadrer et coordonner l’ensemble des services RH – Mettre en place des projets RH pour accompagner l’évolution de l’entreprise –  Gérer les IRP et mener les négociations… ». Est-ce que cela dit quelque chose de la personne en situation professionnelle ? Non. Ça parle de la fonction qu’elle occupe. Information identique pour toute personne qui occuperait ce poste.

Est-ce suffisant pour vous démarquer ? Est-ce pertinent pour valoriser la façon dont vous occupez votre rôle dans la fonction ? Est-ce le bon niveau de communication pour déclencher l’intérêt de ceux que vous souhaitez intéresser ? Probablement pas.

Que dirait un CV de posture ? Probablement une formulation de type « Animer et développer un esprit collaboratif chez les collaborateurs RH – Concevoir, développer et déployer des projets RH innovants pour accompagner l’évolution de l’entreprise – Construire et mener un dialogue social respectueux et efficace ». Et là, ça dit quoi ? Le lecteur va déceler une idée de la façon de manager l’équipe RH, un certain engagement dans un mouvement RH, une créativité dans la transformation, et une vision du dialogue social.

Bien entendu, les mots sont faciles à utiliser. Et l’objet de cet article n’est pas de vous inviter à de la cosmétique. Nous sommes dans une société qui parfois se construit une image valorisante avec peu de mots, quelque peu récurrents. Comme l’évoquait une DRH de mes contacts professionnels : les mots « compte triple ». Tant de profils si bienveillants, empathiques, et inspirants, sur le papier, ou dans le verbe. En revanche, rien de tel qu’un exercice de relation pour incarner, ou pas.

Le CV : une préparation de l’entretien

Car c’est aussi le rôle de cette construction du CV : anticiper et vous préparer à l’étape suivante qu’est l’entretien. En effet, l’objectif de cette analyse de parcours est de vous permettre de vous positionner au cours de l’entretien dans l’analyse, dans le recul, au-delà du descriptif : lieu, poste, missions.

L’ensemble de la réflexion que vous allez construire va vous positionner en posture, réaliste par rapport aux situations vécues. Rien de tel que d’éviter l’entretien où vous vous dites en sortant : je ne suis pas comme ça quand je suis en poste. Ou pourquoi est-ce que je n’ai pas pensé à dire…Je n’avais pas réfléchi à ce type de questions.

En entretien, ce que vous dites de vous dans votre parcours devient un élément de cohérence par apport à la façon dont vous avez construit votre CV. Et l’un des enjeux de l’entretien est de convaincre, en rassurant pas la cohérence, notamment.

Comment faire ?

Positionnez-vous sur votre poste le plus ancien de votre parcours. L’objectif est de réactiver une information au même niveau que la plus récente, pour éviter de le chercher en entretien. C’est aussi une façon de vous construire une vision la plus globale de votre parcours.

1ère étape : analyse du parcours

Sur chacun des postes, en commençant donc par le premier dans votre parcours, vous allez d’abord noter vos :

  • Réalisations : en prenant le point A comme le moment de votre entrée en poste, et le point B celui de sortie, posez-vous la question : que peut-on vous attribuer comme actions, projets, décisions. Vous pouvez vous aider de la définition de fonction, et vous dire « qu’est-ce que j’ai fait sur chaque thématique de ma fonction ? ». Reprenons l’exemple de la fonction RH : une thématique de fonction est « mener le dialogue social ». Une réalisation serait : « faire évoluer la qualité du dialogue social par une affirmation de la fonction RH et une considération des interlocuteurs ». La réalisation répond donc à ce que vous avez apporté au sujet de la thématique.
  • Contributions : au-delà de vos réalisations, le sujet est de vous questionner sur ce que vous apportez à chaque situation en termes de modes de fonctionnement. Si vous reprenez la réalisation RH, vos contributions pourraient être : écouter, me positionner, considérer, prendre des décisions, poser des limites, prendre du recul. Les contributions pourraient être si l’on fait un parallèle avec la cuisine, votre façon de réaliser la recette. Il y a le plat, la fiche, et…votre façon de réaliser : ce que vous ajoutez, les secrets de fabrique. Ce qui fait que c’est votre plat, et pas juste l’application d’une suite d’actions.

Vos contributions sont les ingrédients que vous choisissez d’ajouter pour vous exprimer.

  • Satisfactions : au-delà de résultats, que vous pouvez noter également, il s’agit d’exprimer ce dont vous êtes satisfait(e) dans ce que vous avez réalisé. C’est votre opinion, par le regard des autres, ni une évaluation de l’atteinte de vos objectifs. Reprenons l’exemple RH. Une négociation peut ne pas avoir, encore, abouti, mais vous pouvez être satisfait(e) d’avoir fait évoluer la qualité des réunions, d’avoir apuré un passif dans les relations sociales, d’avoir modifié la qualité du dialogue… Cette partie n’est pas forcément la plus simple. Elle touche en effet à un sujet de culture collective française, davantage construite sur la sanction et l’insatisfaction chronique de l’autorité, le jamais « assez bien ». Cela concerne aussi une forme d’autonomie par rapport à cette autorité, qui n’est plus la seule à reconnaître, ou pas…Par cette analyse de vos satisfactions, vous vous positionnez vous-même sur une vision positive, et réaliste, de vos contributions. En effet, entre cette insatisfaction récurrente et une sortie de route de l’ego de type « je suis génial en tout », un peu d’équilibre ne nuit pas à votre communication professionnelle. Se satisfaire ne signifie pas se contenter. Juste se reconnaître un chemin parcouru, pour s’engager positivement dans la poursuite du sujet.

2e étape : les thématiques du poste

Une fois une vue d’ensemble de votre parcours posée, avec l’aide de la 1ère étape, vous allez commencer par synthétiser ces informations sous forme de thématiques par poste.

Un objectif de la construction du CV de posture est de guider le lecteur sur différents niveaux de lecture possible. Une vision globale par l’entête, que nous verrons à l’étape suivante, puis avec un niveau de détail supplémentaire avec l’organisation / l’entreprise, son activité, le poste. Puis les thématiques du poste, qui vont permettre au lecteur de comprendre la vision que vous proposez de votre poste. Puis si le lecteur le souhaite, un dernier niveau de détail avec les réalisations et postures par thématiques. Ces thématiques représentent avant tout les axes que vous souhaitez valoriser de chaque poste. Elles peuvent être différentes selon le poste. Elles peuvent aussi se répéter, ce qui renforce le « fil conducteur », notamment dans la situation d’un parcours avec des postes différents. Certaines peuvent apparaître au fil du parcours, comme le « management » qui marque une étape.

Ces thématiques peuvent bien entendu être celles de la fonction. On reste alors dans le classico-classique. Mais il faut reconnaître que c’est déjà une étape d’organisation de l’information. Un poste décrit avec un trop grand nombre de lignes finit par perdre l’attention, et surtout, risque de ne pas transmettre une idée claire de vos responsabilités.

Reprenons l’exemple de la fonction RH. Les thématiques pourraient être : développement RH, relations sociales…Ou alors, déterminées par les grands axes des réalisations. Surtout, que ces thématiques traduisent l’orientation que vous donnez, et souhaiterez donc donner à votre futur poste. Vous pouvez aussi les hiérarchiser selon l’importance que vous leur accordez. Surtout, si manager est un rôle qui vous plaît, pour sa posture. Faites-en une thématique, autre qu’«encadrer », « diriger ». Pourquoi pas « dresser » tant que nous y sommes…Un jour un manager m’écrit pour me demander pourquoi son CV n’avait pas été retenu. Je le rappelle et lui expose que l’enjeu du poste était managérial, et qu’à aucun moment le sujet n’apparaissait sur son CV. Et pourtant, il me répond qu’il est un « manager humaniste ». Entre deux excès, le juste équilibre…

Ainsi, pour la fonction RH, les thématiques pourraient être, selon le niveau de responsabilité : Stratégie RH – Accompagnement de la transformation – Développement des collaborateurs – Accompagnement du business – Développement de la relation sociale…      Ces thématiques disent déjà quelque chose du rôle occupé, au-delà de la fonction.

3e étape : synthèse du poste

Dans le format qui sera le vôtre, vous pouvez maintenant synthétiser votre analyse.

Exemple : Entreprise : si vous avez occupé plusieurs postes dans une seule entreprise, ne la répétez pas. Cela renforcera l’idée d’évolution dans l’entreprise, et d’organisation de l’information. 

Poste :  Thématiques : verbe de posture (Participer à, Définir une stratégie, Accompagner, Structurer, Fédérer, Orienter, Déployer…) suivi de la réalisation.

4e étape : l’entête du CV

L’entête permet au lecteur de comprendre le lien entre le parcours réalisé et le projet professionnel. Il permet d’établir un lien entre deux univers qui ne sembleraient pas similaires, mais proches en termes de modes de fonctionnement. Cela permet aussi de sortir d’une récurrence française si rassurante : « fait la même chose – A fait, saura faire – Le même secteur que nous – …Rassurant, mais pas suffisant pour être efficace, pour les deux parties.

Il y a aussi l’entête par compétences. Un « vieux truc » sensé synthétiser un parcours marqué par de nombreux changements. Un listing avant tout, qui ne dit rien de la pondération de chaque compétence selon leur niveau d’expérience, ou leur valorisation par l’auteur du CV.

Cet entête peut comporter plusieurs lignes, qui vont parler de votre parcours, autrement que par une description fonctionnelle. Elle est précise, mais enferme le changement, dans l’identique.

Cet entête peut suivre la structure suivante :

Compétences métier
Compétences transversales
Sujets techniques particuliers maîtrisés ou gérés
Environnement secteurs d’activités expérimentés
Périmètres géographiques

Pour notre exemple RH, cela pourrait donner :

Manager les Ressources Humaines – Accompagner la stratégie de l’entreprise
Manager une équipe – Accompagner la transformation humaine et sociale – Comprendre le business
Négociation d’un accord sur le temps de travail – Gestion de crise sanitaire
Industrie – Environnement technique – B to B – FMCG
Périmètre France – International

Bien sûr, pour compléter l’organisation des informations, vous pouvez indiquer en haut à droite vos diplômes / formations continues, systèmes d’informations et langues. Enfin, évitez plutôt de nommer une rubrique « Divers », qui sonne « fourre-tout ». Préférez « Autres activités », en les spécifiant. Mieux vaut moins mais des activités détaillées, qu’une liste qui ne dit pas grand-chose.

L’idée est donc de globaliser, en disant l’essentiel, tout en étant précis. Qui peut mieux que vous parler de vous ? A vous de choisir, parler de vos postes, ou de vous en poste.

Conclusion

Ce que je vous propose n’est pas tant un format de CV, au sens mise en page. Mais plutôt un format de réflexion, pour vous guider dans une communication qui parle de vous. Si votre recherche s’oriente vers des particularités de poste, d’entreprise, parlez de vous dans le même esprit. Vous optimiserez vos chances de rencontrer des interlocuteurs qui sont en phase avec vos investissements

Cette réflexion sur la communication par le CV rejoint celle par l’annonce pour le recruteur. Diffuser une recherche de poste par la définition de fonction est une réduction, de plus en plus insuffisante pour déclenche l’envie du candidat. Et pourtant, rien de tel que de parler de l’identité, réelle, de l’entreprise, des enjeux du poste, de la culture managériale, réaliste. Mais chacun son rôle.

En tant que candidat, interne ou externe, parlez de vous pour vous différencier, de manière réaliste et argumentée. Savoir-faire est important. Faire-savoir, en toute objectivité, est essentiel. C’est autant un enjeu de mobilité, que de votre propre développement en situation de poste.

A vos claviers !

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