Panorama de droit social de fin février 2006

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Caisse de congés payés – Cotisations

Dèslors que l’activité d’une société est exercée sur le territoirefrançais, cette société est soumise à l’obligation de paiement descotisations de congés payés à la caisse de congés payés (Cass soc. 22février 2006.pourvoi n° 03-18771).

Les faits :

Unesociété de droit anglais ayant son principal établissement en Franceavait cessé à compter du mois de décembre 2000 de payer les cotisationsqu’elle acquittait jusque là à la Caisse des congés payés du bâtimentde la région de l’Ouest. La cour d’appel de Rennes l’avait condamnée àpayer des cotisations et majorations de congés payés à la caisse. Lasociété rétorquait que seules les sociétés ayant leur siège social enFrance étaient nécessairement assujetties à une Caisse de congés payés,la loi ne faisant pas référence à la notion de principal établissement.La chambre sociale rejette le pourvoi de la société.

La solution :

Raressont les décisions de la cour de cassation relatives aux caisses decongés payés’.Elles n’en sont que plus intéressantes’.Pratiquement, cequi détermine l’obligation de cotiser, c’est l’activité et non le lieud’implantation du siège de la société.

Contrat à durée déterminée – Formalisme

Lecontrat de travail à durée déterminée doit être établi par écrit. Adéfaut, il est réputé conclu pour une durée indéterminée (Cass soc. 22février 2006.pourvoi n° 04-42863).

Les faits :

Unsalarié avait été engagé par une société hippique 13 avril 1995, seloncontrat emploi solidarité à durée déterminée d’une durée de six mois,pour « l’entretien et l’installation des espaces verts et des travaux debricolage ». A l’issue de ce contrat, le 14 octobre 1995, il a continuéà exercer sans contrat écrit pour le même employeur. Puis avait étéconclu un contrat emploi consolidé à durée déterminée de 24 mois, uncontrat à durée déterminée et un autre contrat emploi consolidé à duréedéterminée. La relation professionnelle avait cessé le 15 avril 2000.Le salarié avait demandé  la requalification de la relationcontractuelle de travail en un contrat de travail à durée indéterminée.Pour rejeter la demande de requalification en contrat à duréeindéterminée, la cour d’appel d’Agen avait retenu que la périodelitigieuse avait donné lieu à la remise de bulletins de salairesportant la mention « CES », que l’employeur avait retrouvé le double dela convention avec l’Etat pour la période d’avril 1995 à avril 1996, etque les organismes sociaux et la direction départementale du Travailavaient enregistré le salarié comme bénéficiant d’un contrat emploisolidarité, puis d’un contrat emploi consolidé. La cour de cassationcasse cette décision après avoir constaté l’absence de contrat detravail écrit pour la période du 14 octobre 1995 au 13 avril 1996.

La solution :

Lesimple fait qu’un des contrats à durée déterminée n’ait pas étéformalisé permet la requalification du CDD en CDI (application desarticles L. 122-3-1, L. 122-3-13, L. 322-4-8 et L. 322-4-8-1 du Code dutravail).

Repos compensateur – Prescription

Lesalarié, qui n’a pas été en mesure, du fait de son employeur, deformuler une demande de repos compensateur, a droit à l’indemnisationdu préjudice subi, laquelle comporte à la fois le montant del’indemnité de repos compensateur et le montant de l’indemnité decongés payés afférents (Cass soc. 22 février 2006.pourvoi n° 03-45385).

Les faits :

Afinde limiter les sommes allouées aux salariés à titre de dommagesintérêts pour perte du droit à repos compensateur, la cour d’appel deParis avait énoncé que l’indemnité réparant le préjudice subi pourrepos compensateur non pris du fait de la méconnaissance parl’employeur des articles L. 212-5 et D. 212-22 du Code du travail avaitle caractère de dommages intérêts et n’était donc pas pris en comptepour le calcul de l’indemnité compensatrice de congés payés. La cour decassation casse cette décision.

La solution :

La cause est entendue?.En l’espèce le salarié a droit à la fois à l’indemnisation du préjudice subi et à des congés payés’

VRP – Indemnité de clientèle

Dèslors qu’un représentant a, avec l’accord de l’employeur, repris laclientèle d’un autre représentant, même si ce dernier n’a pas ététotalement indemnisé avant la rupture du contrat de travail, il estconsidéré comme son successeur et son apport de clientèle doit êtrepris en considération pour le calcul de l’indemnité de clientèle (Casssoc. 15 février 2006.pourvoi n°04-43978).

Les faits :

Unsalarié avait été engagé en qualité de VRP multicartes en janvier 1997,le contrat prévoyant le rachat de la clientèle de son père.  Licenciépour raison économique à la suite de la liquidation judiciaire de lasociété le 18 décembre 1997, le  salarié avait saisi la juridictionprud’homale à l’effet de voir fixer sa créance à titre de rappel desalaire et d’indemnité de clientèle. Pour rejeter la demande formuléepar le salarié au titre de l’indemnité de clientèle, la cour d’appel deDouai avait retenu que le contrat de travail stipulait que le rachat dela clientèle serait assuré par le salarié sans aucune indication surles modalités de ce règlement et qu’aucune pièce ne permettait d’envérifier la réalité. La chambre sociale casse cette décision.

La solution :

L’indemnitéde clientèle est prévue pour les VRP par l’article L751-9. Quand unreprésentant a, avec l’accord de l’employeur, repris la clientèle d’unautre représentant il est considéré comme son successeur et son apportde clientèle doit être pris en considération pour le calcul del’indemnité de clientèle.

Clause de mobilité – Réduction de rémunération

Lamise en oeuvre d’une clause de mobilité ne peut être imposée au salariélorsqu’elle entraîne une réduction de sa rémunération (Cass soc. 15février 2006.pourvoi n° 04-45584).

Les faits :

Une salariée avait été engagée par une société à compter de 1995 enqualité de vendeuse et avait bénéficié d’une promotion en qualité devendeuse principale à compter de 1997, l’avenant à son contrat detravail prévoyant une clause de mobilité, sa rémunération étantcomposée d’un salaire fixe et d’un salaire variable assis sur lechiffre d’affaire réalisé. Elle avait été licenciée le 25 mai 1999 pouravoir refusé sa mutation pour occuper le même emploi au magasind’Aix-les-Bains, eu égard aux résultats insatisfaisants du magasind’Annecy. La société reprochait à la cour d’appel de Chambéry d’avoirdécidé que le licenciement ne reposait ni sur une faute grave ni surune cause réelle et sérieuse et de l’avoir condamnée à verser à lasalariée diverses sommes. La cour de cassation confirme cette position.

La solution :

Dès lors qu’il y a réduction de la rémunération, il y a modification du contrat de travail qui nécessite l’accord du salarié.

Contrat à durée déterminée – Indemnité de requalification

Lorsquele juge requalifie une succession de contrats de travail à duréedéterminée conclus avec le même salarié en contrat de travail à duréeindéterminée, il ne doit accorder qu’une indemnité de requalificationdont le montant ne peut être inférieur à un mois de salaire (Cass soc.15 février 2006.pourvoi n°04-46848).

Les faits :

Plusieurssalariés avaient été engagés par La Poste selon plusieurs contrats detravail à durée déterminée et à temps partiel. L’employeur avaitensuite conclu avec chacun des salariés un contrat de travail à duréeindéterminée à temps partiel transformé ensuite en contrat à tempscomplet. Les salariés avaient saisi la juridiction prud’homale aux finsd’obtenir la requalification des contrats de travail à durée déterminéeen contrats
de travail à durée indéterminée, ainsi que la condamnationde La Poste au paiement d’une indemnité de requalification au titre dechaque contrat de travail à durée déterminée requalifié, et de diversesindemnités de rupture. La cour d’appel de Montpellier les avaitdéboutés de leurs demandes tendant au paiement d’autant d’indemnités derequalification égales au moins à un mois de salaire que de contrats detravail à durée déterminée requalifié. La chambre sociale confirmecette position.

La solution :

La cour de cassation réitère ici sa position.

Prise d’acte de rupture du contrat de travail – motivation

L’écritpar lequel le salarié prend acte de la rupture du contrat de travail enraison de faits qu’il reproche à son employeur ne fixe pas les limitesdu litige. Le juge est tenu d’examiner les manquements de l’employeurinvoqués devant lui par le salarié, même si celui-ci ne les a pasmentionnés dans cet écrit  (Cass soc. 15 février 2006.pourvoi n°03-47363).

Les faits :

Unsalarié avait été engagé en 1998 par une société en qualité de VRPexclusif à temps partiel. En septembre 1999, l’employeur lui avaitproposé une modification du mode de rémunération qu’il avait refusée.En 2000, le salarié avait pris acte de la rupture en contestant leprocédé consistant à exclure des concours organisés par la société lesreprésentants n’ayant pas voulu signer le nouveau contrat et en faisantvaloir que la journée du premier mai n’avait pas été rémunérée.Estimant que la rupture s’analysait en un licenciement sans causeréelle et sérieuse, le salarié avait saisi la juridiction prud’homaleafin d’obtenir la condamnation de l’employeur au paiement de diversessommes à titre de rappel de primes de résultat des deux concours,d’indemnité de préavis, d’indemnité spéciale de rupture et d’indemnitéde licenciement sans cause réelle et sérieuse. La cour d’appel de Parisavait  dit que la rupture du contrat de travail à l’initiative dusalarié produisait les effets d’un licenciement sans cause réelle etsérieuse et avait condamné l’employeur au paiement d’une indemnité depréavis, d’une indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuseet d’une indemnité spéciale de rupture. L’employeur soutenait quelorsqu’un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail enraison de faits qu’il reproche à son employeur, les juges du fonddoivent examiner si les faits invoqués étaient ceux qui avaient motivéla prise d’acte de la rupture. Or, dans la lettre de démission lesalarié n’invoquait, au titre des manquements reprochés à sonemployeur, que l’exclusion des deux concours, le non-paiement de lajournée du 1er mai et l’absence de salaire fixe, de remboursement defrais et de délégués du personnel dans l’entreprise. La cour decassation casse cette décision.

La solution :

Ils’agit ici d’une arrêt confirmant la position de la cour de cassation :l’écrit par lequel le salarié prend acte de la rupture du contrat detravail en raison de faits qu’il reproche à son employeur ne fixe pasles limites du litige.

Contrôle URSSAF – Réponse aux observations

Lesilence gardé par l’employeur, lors d’un contrôle URSSAF, ne le privepas de la faculté d’invoquer devant la juridiction contentieusel’éventuelle insuffisance des observations de l’agent contrôleur (Cassciv.2°. 9 février 2006.pourvoi n° 04-30535).

Les faits :

Ala suite d’un contrôle, l’URSSAF avait réintégré dans l’assiette descotisations sociales dues par une au titre de la période du 1er février1999 au 1er décembre 2000 le montant de l’avantage en nature résultantpour certains salariés de l’utilisation à titre privé du véhiculequelle avait mis gratuitement à leur disposition. Ce redressement avaitdonné lieu à une mise en demeure notifiée à l’employeur le 29 janvier2002. Pour rejeter le recours de la société, qui se prévalait del’insuffisance au regard des exigences de l’article R. 243-59 du Codede la sécurité sociale des observations de l’inspecteur du recouvrementreçues le 28 novembre 2001, le tribunal des affaires de sécuritésociale d’Evry, après avoir relevé que la société n’avait pas mis àprofit le délai de trente jours prévu par ce texte pour obtenir desexplications sur les bases de calcul des cotisations et sur les détailsde l’opération et avait participé aux opérations de contrôle, avaiténoncé que cette passivité équivalait à une acception du redressementet qu’elle ne pouvait ignorer la nature de la mise en demeure. La courde cassation casse ce jugement.

La solution :

Cettedécision est rendue sur la base de l’article R 243-59 du Code de lasécurité sociale. Le silence gardé par l’employeur, lors d’un contrôleURSSAF, ne le prive pas d’invoquer ses arguments lors de la phasecontentieuse.

Organisme se substituant aux obligations de l’employeur – Responsabilité

Selonl’article L. 511-1, alinéa 2, du Code du travail lorsqu’un organisme sesubstitue habituellement aux obligations légales de l’employeur, ilpeut être mis en cause aux côtés de celui-ci en cas de litige entrel’employeur et ses salariés (Cass soc. 28 février 2006.pourvoin°03-44.781).

Les faits :

Unesalariée avait été engagée en 1990 en qualité de garde au domiciled’une personne par l’intermédiaire d’une association  qui était chargéedu recrutement, de l’établissement des bulletins de paie et del’accomplissement des diverses formalités administratives inhérentes àl’emploi. La salariée ayant saisi la juridiction prud’homale pourobtenir le paiement d’astreintes et d’heures supplémentaires,l’employeur avait appelé l’association en la cause pour être garanti detoute condamnation éventuellement prononcée à son encontre. La courd’appel de Lyon avait condamné l’association à garantir pour moitié lacondamnation de l’employeur au paiement d’un rappel de salaire enfaisant ressortir qu’elle s’était régulièrement substituée àl’employeur pour l’accomplissement de cette obligation légale, de sortequ’elle pouvait être appelée en garantie devant la juridiction saisiedu litige opposant l’employeur à sa salariée au sujet de sarémunération. La chambre sociale confirme cette position.

La solution :

Il s’agit ici d’une solution intéressante rendue sur la base de l’article L. 511-1, alinéa 2, du Code du travail.

Maladie – Visite médicale

L’employeur,tenu d’une obligation de sécurité de résultat en matière de protectionde la santé et de la sécurité des travailleurs dans l’entreprise, doiten assurer l’effectivité. Il ne peut dès lors laisser un salariéreprendre son travail après une période d’absence d’au moins huit jourspour cause d’accident du travail sans le faire bénéficier lors de lareprise du travail, ou au plus tard dans les huit jours de celle-ci,d’un examen par le médecin du travail destiné à apprécier son aptitudeà reprendre son ancien emploi, la nécessité d’une adaptation desconditions de travail ou d’une réadaptation ou éventuellement de l’uneet de l’autre de ces mesures. A défaut l’employeur ne peut résilier lecontrat de travail à durée indéterminée du salarié, dont le droit à lasécurité dans le travail a ainsi été méconnu, que s’il justifie soitd’une faute grave de ce dernier, soit de l’impossibilité où il setrouve, pour un motif non lié à l’accident, de maintenir ledit contrat(Cass soc. 28 février 2006.pourvoi n°05-41.555)..

Les faits :

Unsalarié avait été  victime, le 8 septembre 1999, d’un accident dutravail provoquant un arrêt de travail jusqu’au 6 décembre 1999, puis,suite à une rechute, du 25 janvier 2000 au 10 mai 2000. Le salariéavait repris à cette date son activité sans avoir été soumis à l’examenmédical de reprise. Ayant été, avant et après ces arrêts pour accidentdu travail, en arrêt de travail pour maladie, son employeur l’avaitlicencié le 27 novembre 2000 pour absences répétées désorganisantl’entreprise et nécessi
tant son remplacement définitif. Pour rejeter lademande du salarié en paiement de dommages intérêts en réparation despréjudices résultant du caractère illicite de son licenciement et del’absence de visite médicale de reprise, la cour d’appel de Douai avaitretenu que, si en l’absence de visite de reprise par le médecin dutravail, la période de suspension du contrat de travail de l’article L.122-32-1 du Code du travail consécutive à un accident du travailcontinue, quand le salarié reprend effectivement son travail, il y aantinomie entre exécution et suspension du contrat de travail, de sortequ’en reprenant le travail sans visite médicale de reprise, le salariéa mis fin à la suspension du contrat de travail. La cour de cassationcasse cette décision.

La solution :

Cettesolution a été rendue sur la base de l’article L 230- 2, I, du Code dutravail interprété à la lumière de la directive CE n° 89/391 du 12 juin1989, concernant la mise en oeuvre de mesures visant à promouvoirl’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs autravail  et des articles L. 122-32-2 et R. 241-51 du Code du travail..

Auteur : François TAQUET, professeur de droit social, avocat, conseil en droit social, et consultant pour GERESO.

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