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Partager la publication "L'accord du 11 janvier 2008 sur la modernisation du marché du travail : évolution ou révolution dans le droit du travail ?"
Allongement de la période d’essai.
Le MEDEF souhaitait allonger la période d’essaià trois mois renouvelables pour les ouvriers, employés et techniciens et à six mois renouvelables pour les cadres.
Les syndicats s’opposaient à cet allongement.
Finalement, le projet d’accord prévoit que pour les contrats de travail à durée indéterminée, la période d’essai est allongée : « pourles ouvriers et employés entre un et deux mois maximum, les agents demaîtrise et les techniciens entre deux et trois mois, les cadres entretrois et quatre mois « , sauf si un accord de branche prévoit une durée supérieure.
Cette période pourra être reconduite une fois par des accords de branche et les durées ne pourront excéder quatre, six et huit mois.
Une période d’essai plus courte pourra être fixée » dans la lettre d’engagement ou dans le contrat de travail « .
Lorsqu’il est mis fin par l’employeur à la période d’essai, la durée du délai de prévenance pendant la période d’essai est fixée comme suit :
Modification des indemnités de rupture
Le montant de l’indemnité interprofessionnelle de licenciement ne pourra être inférieur à un cinquième du salaire mensuel.
Rappelons que la loi de modernisation sociale avait porté le montantminimum de l’indemnité légale de licenciement économique à 1/5° de mois de salaire par année d’ancienneté, l’indemnité de licenciement pour motif personnel restant à 1/10° de mois par année d’ancienneté.
Désormais, il y aura unité entre les indemnités de licenciement pour motif personnel et économique. En outre, l‘indemnité sera due à partir d’un an d’ancienneté dans l’entreprise.
En outre, la négociation prévoit que le législateur fixera » un plancher et un plafond » pour l’indemnité, en cas de contestation judiciaire d’un licenciement sans cause réelle ni sérieuse.
Or, tel n’est pas toujours le cas actuellement ainsi que le montre le tableau de synthèse ci après :
Rappel des principales sanctions en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse
(licenciementabusif, absence ou insuffisance de motivation de la lettre delicenciement, absence de recherche de reclassement dans le cadre dulicenciement économique…).
SITUATION |
SANCTION |
Salarié ayant au moins deux ans d’ancienneté et employé dans une entreprise d’au moins 11 salariés |
6 mois de salaire minimum + remboursement à l’ASSEDIC des allocations de chômage dans la limité de 6 mois |
Salarié ayant moins de deux ans d’ancienneté et/ou employé dans une entreprise de moins de 11 salariés |
Suivant le préjudice subi |
Licenciement en cas d’inaptitude non professionnelle à l’emploi
Encas d’inaptitude d’origine non professionnelle (ex : maladie), et dansle cas où¹ le salarié ne peut être reclassé, les indemnités delicenciement pourront être prises en charge par un fonds de mutualisation à la charge des entreprises.
Création d’un mode de rupture amiable
Afin de » privilégier les solutions négociées à l’occasion des ruptures de contrat « ,un mode de rupture » exclusif de la démission et du licenciement « , est créé.
Le salarié et l’employeur pourront organiser les conditions de la fin du contrat qui les lie.
Toutefois, un droit de rétractation existe » pendant un délai de quinze jours suivant la signature de la convention » entre les deux parties.
L’accord devra ensuite être validé par le directeur départemental du travail. Moyennant la conclusion de cet accord, lesalarié bénéficiera d’une indemnité de rupture équivalant à uncinquième de mois par année d’ancienneté et accédera aux allocationschômage.
Ceci étant, beaucoup de zones d’incertitude demeurent sur cette proposition…
Certes l’idée de développer la notion de départ négociée en droit du travail doit être saluée pour au moins deux raisons :
L’idée de créer un mode derupture spécial en droit du travail était donc souhaitée par ladoctrine. Comme l’avait expliqué la revue Entreprise & Personnel, cettecréation » permettrait de dépasser la part d’hypocrisie qu’il y a dansla transaction et d’aller vers plus de transparence « .
On peut toutefois s’interroger sur deux points :
Celle-ci dispose à ceteffet d’un délai préfix de 15 jours calendaires à l’issue duquel sonsilence vaut homologation. Le montant de l’indemnité versée sera aumoins égal à l’indemnité légale de licenciement.
Création d’un contrat à objet précis
Onse souvient que le rapport de Virville de janvier 2004 avait prôné lacréation d’un contrat à objet précis, permettant d’apporter un peu de souplesse au cadre très rigide du contrat à durée déterminée.
Cette idée a été reprise par le MEDEF qui a proposé lacréation d’un CDI à objet précis d’au moins 18 mois qui prendrait finune fois achevé le projet pour lequel le salarié a été embauché (sur le modèle du contrat de chantier), sa durée « approximative » devant être mentionnée dans le contrat.
Finalement, l’idée du CDI est abandonnée, ledit contrat de mission étant un contrat expérimental à durée déterminéeà terme incertain pour la réalisation d’un objet défini, réservé aux ingénieurs et aux cadres
.
La durée du projet doit être comprise entre 18 et 36 mois, et le contrat est de 12 mois minimum non renouvelable.
Le recours à ce contrat est subordonné à un accord de branche ou d’entreprise et » ne peut être utilisé pour faire face à un accroissement temporaire d’activité « .
Il peut être rompu à la date anniversaire de sa signature pour un motif réel et sérieux.
En cas de rupture, l’indemnité perôue par le salarié atteindra 10 % de la rémunération reçue pendant le contrat.
En l’espèce, on est très loin de l’idée de contrat uniqueque défendait le président de la république pendant la campagneélectorale. Il existe déj à 38 formes de contrat de travail différenteset 12 possibilités de recours au CDD.
Force estde constater que le présent accord ne fait qu’accroître les difficultésen ajoutant une 13° possibilité de recours…
La transférabilité des droits
Concernant le droit à la formation (DIF), le MEDEF a accepté que le salarié devenu chômeur puisse garder 100% des droits acquis, contre 50% dans ses propositions antérieures.
En accord avec le nouvel employeur, il pourra utiliser ce crédit d’heures pendant les deux années suivant son embauche. Ceci étant, le gestion de ce transfert risque pour le moins d’être compliqué.
On notera également que lesalarié qui se retrouve au chômage pourra garder sa couvertureprévoyance santé pendant une durée égale à un tiers de sa duréed’indemnisation du chômage, avec un minimum de trois mois.
Autres dispositions
Ainsi, auterme de ce bref panorama, force est de constater que l’accord du 11janvier 2008 constitue une simple évolution du droit du travail. On estbien loin de la simplification rêvée par certains. Encore faut il enoutre maintenant que cet accord péniblement négocié soit approuvé parles centrales syndicales et fasse l’objet d’un projet de loi…
Auteur : François TAQUET, Professeur de Droit Social, Avocat, Conseil en Droit Social, consultant-formateur pour GERESO.