Alcool sur le lieu de travail : législation, prévention, contrôles, sanctions…

Cet article a été publié il y a 13 ans, 1 mois.
Il est probable que son contenu ne soit plus à jour.

 

L’alcool au travail est une réalité : déjeuners, pots de départs ou de fin d’année…

On consomme des boissons alcoolisées, sans bien savoir ce qui est autorisé et ce qui ne l’est pas.

Il est donc important pour chacun de connaitre la législation en vigueur concernant l’alcool au travail, que l’on soit chef d’entreprise ou salarié.

Et quand l’employeur se retrouve confronté à l’alcoolisme d’un salarié, il convient de réagir de façon juste et proportionnée.

 

Quelques chiffres

Une étude IFOP, réalisée en décembre 2008 pour l’Association de Prévention et de Suivi de la Sécurité Routière, a montré que :

  • Plus de 90% des salariés français participent à des pots en entreprise.
  • 70% des pots proposent de l’alcool.
  • 58% des entreprises concernées n’ont pris aucune disposition particulière à ce sujet.
  • La gestion des risques liés à la consommation d’alcool est une question qui se pose de manière de plus en plus ouverte dans de nombreuses entreprises. Les dirigeants, les responsables des ressources humaines, l’encadrement proposent désormais des solutions pour assurer la sécurité des salariés, en proposant, lors des pots par exemple, des éthylotests et des systèmes de raccompagnement à domicile. Certaines entreprises choisissent de limiter, voire de supprimer, les boissons alcoolisées.

    Les obligations de l’employeur

    Une consommation d’alcool restreinte. En tant que garant de l’hygiène et de la sécurité dans votre entreprise, vous avez certaines obligations. La loi vous impose d’empêcher l’introduction ou la distribution de boissons alcooliques, à l’exception, curieusement, du vin, de la bière, du cidre, du poiré et de l’hydromel non additionnés d’alcool. Par ailleurs, vous pouvez interdire à tout salarié en état d’ivresse d’entrer dans l’entreprise ou d’y rester. Cela ne vous empêche pas d’aller plus loin et d’interdire, pour la sécurité et la discipline, toute boisson alcoolisée.

    Des pots pas trop arrosés. La pratique des « pots » (à l’occasion d’un départ, de fêtes de fin d’année, etc.) dans l’entreprise n’est pas interdite. Veillez à ce que les salariés qui reprennent le travail à l’issue du pot n’y consomment que les boissons autorisées. Si cela vous paraît préférable, vous pouvez décider d’y supprimer toute boisson alcoolisée.

    Une prévention efficace

    Un règlement intérieur ciblé. Vous pouvez encadrer, via le règlement intérieur, l’introduction et la consommation de boissons alcoolisées dans l’entreprise, et même les interdire formellement pour tous les salariés.

    Vous pouvez aussi y prévoir le contrôle de l’état d’ébriété d’un salarié dans les conditions suivantes :

  • le contrôle ne peut pas porter sur tout salarié, sans distinction : ne peuvent être visés que ceux qui manipulent des machines ou produits dangereux et qui conduisent des engins ou véhicules automobiles, ou encore, les salariés dont l’état d’ébriété constituerait une menace pour eux-mêmes ou leur entourage (ex. : en raison de la configuration des lieux) ;
  • les salariés doivent pouvoir contester le test d’alcoolémie (en demandant une contre-expertise ou en exigeant de passer un second test).
  • S’appuyer sur le médecin du travail. Le médecin du travail a un rôle actif à jouer : il peut apprécier l’aptitude d’un salarié à son poste et faire pratiquer des examens complémentaires à l’examen clinique, quand la situation le justifie.

    Des contrôles pertinents

    Une fouille justifiée. La fouille des salariés est autorisée pour des raisons de sécurité collective. Si vous soupçonnez un salarié de détention d’alcool, vous ne pouvez ouvrir son armoire individuelle que dans les cas et aux conditions prévus par le règlement intérieur et en présence de l’intéressé.

    Un recours à l’éthylotest encadré. En aucun cas, vous ne pouvez contraindre vos salariés à des examens sanguins. En revanche, dès lors que la mesure est prévue dans le règlement intérieur, vous pouvez leur faire passer un test d’alcoolémie dans les conditions décrites ci-avant. Le test peut être effectué par vous-même ou toute personne que vous aurez désignée.

    Des sanctions proportionnées

    Prouver l’ébriété. Si vous ne disposez pas d’un test positif, qui est une base valable à une sanction disciplinaire, vous avez tout intérêt à recueillir suffisamment de preuves pour pouvoir prouver l’état d’ébriété de l’intéressé :

  • Témoignages. Dans le cas où l’ébriété du salarié est manifeste (ex. : démarche titubante), vous pouvez demander aux personnes ayant été à son contact des témoignages attestant de cet état. Mais ce mode de preuve a parfois une efficacité réduite : ainsi, le seul témoignage d’un client de l’entreprise a été jugé insuffisant à établir l’état d’ivresse d’un salarié.
  • Forces de l’ordre. Le cas échéant, vous pouvez demander aux services de police ou de gendarmerie de venir constater le niveau d’alcoolémie d’un salarié.
  •  Adapter la sanction à la situation. L’alcoolisme en lui-même n’est pas un motif de sanction car il relève de l’état de santé du salarié. En revanche, l’ivresse du salarié ou la consommation d’alcool pendant le temps de travail peuvent constituer des motifs légitimes de licenciement, dans la mesure où un salarié en état d’ébriété ne peut pas exercer correctement son travail. Comme toujours, la sanction doit être proportionnée à la faute. Elle doit ainsi tenir compte des circonstances, des fonctions et de l’ancienneté du salarié.

    Ce qu’en disent les juges

    Cause réelle et sérieuse de licenciement : oui

  • État d’ébriété manifesté par des hurlements et des injures sur le lieu de travail (magasin) et grossièreté à l’égard d’un fournisseur.
  • Cause réelle et sérieuse de licenciement : non

  • Salarié surpris avec des collègues, un verre de pastis à la main, 10 minutes avant la fin de la journée de travail, dans les vestiaires et non dans l’atelier, après 13 ans d’ancienneté irréprochables.
  • Comportement d’un salarié laissant supposer un état d’ivresse alors qu’il était dû à un traitement médical dont l’employeur était informé.
  • Faute grave : oui

  • Contremaître ayant consommé de l’alcool sur le lieu et pendant le travail, en violation du règlement intérieur et alors qu’il se devait de donner l’exemple.
  • Règlement intérieur : modèle de clause

    « Il est interdit de pénétrer dans l’entreprise en état d’ivresse et d’y introduire ou d’y consommer des boissons alcoolisées.

    Les salariés qui manipulent des produits dangereux, sont affectés à une machine dangereuse ou conduisent des engins ou véhicules automobiles transportant notamment des personnes pourront être soumis à un éthylotest en cas de doute.

    Le contrôle sera effectué par un ou des agents habilités, désignés par la direction de l’établissement. Le salarié pourra exiger que le contrôle s’effectue en présence d’un membre du personnel de son choix et qu’une contre-expertise sur son état soit réalisée. »

    Un guide pratique en ligne

    Réalisé par une équipe pluridisciplinaire de partenaires sociaux, salariés, employeurs, médecins du travail, de représentants de l’administration (Inspection Médicale du Travail et de la Main d’OEuvre, Inspection du Travail), ce guide pratique se veut un outil répondant aux besoins exprimés par les entreprise
    s ; il doit permettre d’instaurer un dialogue apaisé entre hiérarchie et salariés pour une bonne résolution des difficultés individuelles ou collectives liées à la consommation d’alcool. Une politique anti-alcool ne se décrète pas. Elle s’élabore avec le personnel de l’entreprise. Elle est une démarche collective sans laquelle les solutions ponctuelles ne peuvent être mises en oeuvre.

  • Téléchargez le guide pratique (format PDF)
  • Ai-je un problème avec l’alcool ? Un test pour se situer

    Voici un test mis au point par l’Organisation Mondiale de la Santé: Alcohol Use disorders Identification Test (AUDIT*). Il vise à aider les personnes à se situer par rapport à l’alcool.

  • Effectuer le test en ligne
  • Législation sur l’alcool dans les entreprises

    Article L.232-2 du Code du travail : « Il est interdit à toute personne d’introduire ou de distribuer dans les établissements […] pour être consommées par le personnel, toutes boissons alcooliques […] autres que le vin, la bière, le cidre, le poiré, l’hydromel non additionnés d’alcool. »

    Article L.232-2 du Code du travail : « Les conventions collectives ou les contrats individuels de travail ne peuvent comporter de dispositions prévoyant l’attribution, au titre d’avantage en nature, de boissons alcooliques aux salariés. » 

    Les articles R.232-2 et R.232-3-1 du Code du travail prévoient :  « […] la mise à disposition des travailleurs d’eau potable et fraîche » ; « […] quand les conditions de travail entraînent les travailleurs à se désaltérer fréquemment, l’employeur est tenu de mettre gratuitement à leur disposition au moins une boisson non alcoolisée ». 

    La circulaire du 13 janvier 1969 apporte des recommandations pour l’application de ces textes et précise le règlement intérieur. C’est à celui-ci de délimiter le cadre de consommation des boissons alcooliques dans l’entreprise : interdiction, limitation aux repas en dehors des horaires de travail.

    Bases réglementaires du dépistage de l’alcoolisme en entreprise

    Le dépistage de l’alcoolisme en entreprise concerne essentiellement l’alcoolisation aiguë.

    Article L.232-2 du Code du travail : « Il est interdit à tout chef d’établissement […] à toute personne ayant autorité sur les ouvriers et employés de laisser entrer ou séjourner […] des personnes en état d’ivresse. » 

    Le règlement intérieur joue un rôle central dans le dépistage de l’alcoolisation dans l’entreprise : Loi du 8 décembre 1983 : « Le contrôle de l’état alcoolique dans les établissements […] est à fixer par le règlement intérieur. »

    L’article L.122-35 du Code du travail fixe les règles de contenu du règlement intérieur, qui doit être un document non discriminatoire. 

    Arrêt Corona du 1er février 1980 : « L’éthylotest ne peut être pratiqué de façon systématique sur l’ensemble du personnel, il est à réserver à des conditions de travail particulières (postes de sécurité) ». 

    Arrêt RNUR du 9 octobre 1987 : « L’éthylotest doit avoir pour but de prévenir et faire cesser une situation dangereuse, et non de permettre à l’employeur de constater une faute disciplinaire. » Un employeur peut donc proposer des éthylotests aux salariés de son entreprise quand cela est précisé dans le règlement intérieur. Doivent y figurer également les conditions et modalités du dépistage ainsi que la liste des postes concernés. Il est à noter que l’éthylotest est un acte non médical, qui peut donc être effectué par l’employeur ou une personne déléguée par lui, les résultats étant transmis à l’employeur. Cet examen peut déboucher sur une prise en charge médicale si l’état du salarié l’impose. 

    En juin 2007, la Cour de cassation a ainsi eu à se prononcer sur le cas d’un salarié du Rhône qui s’était tué au volant de son véhicule après un pot d’entreprise. Son patron avait été poursuivi pour homicide involontaire avec un cadre et un gardien, également accusés de non-assistance à personne en danger. L’homicide involontaire avait été rejeté en cassation, mais la Cour avait retenu la non-assistance à personne en danger. 

    Jurisprudence alcool et travail :

  • 27 mai 2005 – Etat d’ébriété
  • 17 mai 2005 – Licenciement
  • 11 mars 2003 – Accident, conduite en état d’ivresse
  • 2 décembre 2003 – Conduite en état d’ivresse
  • 22 mai 2002 – Alcootest en entreprise
  • Sources : Ministère du travail, RF Social, preventionalcool.com

    Qu'avez-vous pensé de cet article ?

    Note moyenne de 0/5 basé sur 0 avis

    Soyez le premier à donner votre avis

    Laisser un commentaire

    Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *