Tout savoir sur le CDI de projet

La réforme du travail constitue sans nul doute l’un des grands axes du projet d’Emmanuel Macron. En effet, le nouveau président de la République avait annoncé cet objectif lors de sa campagne électorale : aller encore plus loin que la loi El Khomri publiée en 2016.

Contrat-de-projet-CDI

Si l’idée principale de cette réforme est de privilégier la négociation collective dans l’entreprise, l’autre aspect fondamental consiste à agir directement au niveau du contrat de travail en instaurant ce que l’on pourrait appeler une « flexibilité sécurisée » par la création d’un nouveau type de contrat de travail, le contrat de projet. Ce contrat de projet est à mi-chemin entre le contrat de travail à durée indéterminée (CDI) et l’intérim.

Nous allons tenter de développer dans ce dossier les principales dispositions qui devraient être appliquées à ce contrat de projet également appelé contrat de missions ou encore, contrat d’opérations : quels seront les secteurs et les métiers concernés par ce contrat ? Quelle est sa durée ? Quelles sont les modalités permettant de rompre ce contrat ? Etc.

Si la procédure relative à la réforme du code du travail a été engagée l’été dernier par le biais d’ordonnances, les textes de ces ordonnances ont été récemment publiés au Journal Officiel. En principe, toutes ces nouvelles mesures devraient s’appliquer le 1er janvier 2018 au plus tard.

Le CDI de projet est-il inspiré du contrat de chantier ?

Oui, sans aucun doute ! Le CDI de projet est largement inspiré du CDI de chantier qui existe déjà dans le secteur du BTP. En effet, dans le secteur du BTP, recruter en contrat à durée déterminée est difficile car ce type de contrat nécessite généralement une date de fin précise. Or, il est souvent impossible de prévoir le délai exact de la fin d’un chantier et ce, en raison des aléas météorologiques, des retards de livraison, des retards des autres corps de métiers, etc.

Les employeurs du BTP usent donc de la possibilité de conclure des contrats de chantier aux caractéristiques spécifiques. En effet, le contrat de chantier permet à un employeur d’ajuster la durée du contrat de travail en fonction de l’état d’avancement du chantier. Le contrat de chantier inclut donc une clause de chantier par laquelle l’employeur peut licencier le salarié lorsque le projet pour lequel il a été recruté se termine. Le contrat ne prévoit donc pas de date de fin précise.

Le gouvernement a souhaité étendre ce contrat à d’autres secteurs dans lesquels le travail s’effectue par l’exécution de différentes missions dont il est difficile de connaître la date de fin exacte. Les avantages sont nombreux pour l’employeur. Ainsi, par exemple, contrairement à un CDD, un contrat de chantier n’ouvre pas droit à des indemnités de fin de contrat équivalentes à 1/10ème des rémunérations perçues.

L’idée n’est pas de généraliser le contrat de projet à toutes les entreprises mais seulement à certains secteurs d’activité, par la conclusion d’accord de branche. Ainsi, la Ministre du travail Muriel Pénicaud a cité l’exemple du secteur de l’informatique et de l’aéronautique dans lequel les employeurs pourraient être intéressés par ce type de contrat de travail plus attractifs que le recours aux travailleurs indépendants ou aux salariés en CDI qui doivent continuer à être payés entre deux missions.

Notons par ailleurs qu’aucune indication n’est donnée sur la durée des missions qui pourront être proposées. Celles-ci pourront donc durer 6 mois, 3 ans, 5 ans, etc.

Comment conclure un CDI de chantier ?

Selon les textes des ordonnances, un employeur ne pourra pas décider seul de conclure un contrat de projet. Il faudra pour chaque métier qu’un accord de branche étendu soit validé, c’est-à-dire négocié par les partenaires sociaux.

En effet, selon le nouvel article L.1223-8 du code du travail, la conclusion d’un contrat de projet nécessite la conclusion préalable d’une convention ou d’un accord collectif de branche étendu qui définit les raisons permettant de recourir à un tel type de contrat.

La convention ou l’accord collectif de branche peut notamment préciser (C. trav. nouveau art. L1223-9) :

  • La taille des entreprises concernées ;
  • Les activités concernées ;
  • Les mesures d’information du salarié sur la nature de son contrat ;
  • Les contreparties en termes de rémunération et d’indemnité de licenciement accordées aux salariés ;
  • Les garanties en termes de formation pour les salariés concernés.

En pratique, le contrat de projet sera donc différent d’un secteur d’activité à un autre.

En l’absence d’un tel accord, le texte des ordonnances reste encore imprécis. En effet, il est indiqué que le contrat de projet pourra alors être conclu dans les secteurs où son usage est habituel et conforme à l’exercice régulier de la profession qui y recourt au 1er janvier 2017.

Même si pour l’heure, il n’est pas possible de connaître la liste des secteurs et des métiers concernés (puisque concrètement tout va dépendre des négociations entre les partenaires sociaux), on peut réellement penser que de nombreux secteurs seront intéressés par ce type de contrat et ce, pour différentes catégories d’emplois, notamment les cadres.

Quelle est la durée du contrat de projet ?

Le CDI de chantier permet d’embaucher un salarié sur une durée beaucoup plus longue qu’un contrat à durée déterminée (CDD) classique. En effet, le contrat de projet est conclu pour une durée indéterminée puisque la fin du contrat n’est pas fixée par une date.

Toutefois, l’employeur a la possibilité, au cours de l’exécution du contrat, d’ajuster la durée effective de celui-ci à ses besoins réels et ses éventuels contretemps. Il peut donc s’arrêter au terme de la mission ou du projet pour lequel le salarié a été engagé, ce qui n’est évidemment pas possible dans le cas d’un CDI classique.

Rupture du CDI de projet : quelles modalités ?

L’employeur a donc la possibilité de rompre le contrat de projet à la fin du chantier ou à la réalisation des tâches qui ont été contractuellement définies (C. trav. nouveau art. L1236-8).

En clair, ce type de contrat permet donc à l’employeur de se séparer des salariés embauchés à la fin des travaux ou de la mission sans pour autant devoir mettre en place la procédure de licenciement pour motif économique. En effet, la rupture qui intervient pour l’un de ces motifs constitue un licenciement qui repose sur une cause réelle et sérieuse.

Ainsi, par exemple, si on prend le cas d’un contrat de chantier, la fin du chantier signe la fin du contrat de travail. Le salarié est alors licencié pour motif personnel. L’employeur a ainsi pu, librement et sans complication, ajuster la durée du contrat à ses besoins et s’adapter aux éventuels contretemps.

Ce licenciement reste toutefois soumis à la procédure prévue pour les licenciements pour motif personnel. L’employeur doit donc respecter la procédure prévue aux articles L1232-2 à L1232-6 du code du travail, c’est-à-dire :

  • Envoyer au salarié concerné une convocation à un entretien préalable par lettre recommandée avec accusé de réception ou par lettre remise en mains propres contre décharge ;
  • Organiser un entretien préalable avec le salarié avec la possibilité pour ce dernier de se faire assister ;
  • Notifier le licenciement au salarié par lettre recommandée avec accusé de réception dans un délai de 2 jours ouvrables minimum après l’entretien préalable.

Par ailleurs, contrairement à ce qui se passe en cas de rupture du contrat à durée déterminée, le salarié ne perçoit aucune prime de précarité.

Toutefois, l’employeur doit verser au salarié certaines indemnités prévues aux articles L1234-1 à L1234-18 du code du travail :

  • Une indemnité de préaviscalculée sur la base du salaire brut qu’il aurait touché s’il avait travaillé pendant la durée du préavis ;
  • Une indemnité compensatrice de congés payés ;
  • Parfois une indemnité de licenciement si le salarié compte au moins 8 mois d’ancienneté ininterrompue au service du même employeur.

L’employeur doit également remettre au salarié un certificat de travail et un reçu pour solde de tout compte.

Par ailleurs, dans l’hypothèse où le chantier ou l’opération pour lequel ce contrat a été conclu ne peut pas se réaliser ou se termine de manière anticipée, la convention ou l’accord collectif de branche mettant en place le recours au contrat de projet doit prévoir des modalités adaptées de rupture du contrat (C. trav. nouveau art. L1236-9).

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