Les représentants de proximité : désignation, rôle, missions concrètes…

Qui sont ces nouveaux acteurs que les ordonnances Macron en date du 22 septembre 2017 ont créés ? On les voit émerger dans de nombreuses entreprises, mais ils ont un rôle qui varie d’une entreprise à l’autre, et il n’est pas toujours facile de comprendre ce qu’ils ont le droit de faire ou non, dans l’enceinte de l’entreprise. La loi reste très imprécise sur ces nouveaux acteurs et il est attendu que les partenaires sociaux en dessinent eux même les contours, ce qui peut créer des incertitudes.

Cet article a été publié il y a 4 ans, 2 mois.
Il est probable que son contenu ne soit plus à jour.
Les représentants de proximité : désignation, rôle, missions concrètes…
Les représentants de proximité, de nouveaux acteurs du dialogue social en entreprise

Des acteurs de proximité

Le 1er janvier 2020 est la date limite pour la fusion des anciennes IRP (délégué du personnel, comité d’entreprise et comité hygiène sécurité et conditions de travail) au sein d’une instance unique, le comité social et économique (CSE). En sus de cette fusion, le législateur a ouvert le champ de la représentation en proposant de nouveaux organes, comme le conseil d’entreprise. En effet, le CSE peut dorénavant négocier des accords directement avec l’employeur.

Les représentants de proximité entrent dans cette dynamique. En effet, le législateur a souhaité créer un acteur local. Mais attention, le confondre avec l’ex-délégué du personnel est un raccourci. En effet, le comité social et économique a repris les missions des DP et c’est pourquoi ce n’est pas un délégué du personnel.  

L’objectif est de proposer aux salariés un relai au niveau local. Il est possible que l’entreprise ait des sites géographiquement espacés ou des métiers très divers. Dans ce cas et pour faire face aux disparités géographiques ou fonctionnelles, des représentants sont alors désignés par le comité social et économique.

Néanmoins, il est possible que le comité social et économique lui délègue une partie de ses pouvoirs relevant à l’époque des délégués du personnel. En tout état de cause, les représentants de proximité ont des missions au niveau local. Ils sont des interlocuteurs privilégiés pour régler les difficultés qui peuvent se présenter dans les différents pôles de l’entreprise mais aussi avec le management. Ils peuvent donc aussi bénéficier d’un véritable rôle d’intermédiaire pour dénouer des situations complexes. En ce sens, ils n’ont pas pour seul rôle de présenter les réclamations individuelles et collectives. Ils peuvent par exemple avoir certaines missions qui relevaient de l’ex-CSHCT, comme les enquêtes accident du travail/maladie professionnelle ou encore détenir le droit d’alerte local.

Enfin, les représentants ne sont pas forcément des salariés élus ou présentés sur une liste. Il peut s’agir de salariés de l’entreprise ne possédant aucun mandat. La loi n’offre pas de précisions sur ce point mais si on fait une interprétation littérale de l’article L2313-7 du Code du travail, on peut considérer qu’un simple salarié peut exercer cette mission – ce qui compte c’est sa capacité à représenter des salariés d’une catégorie spécifique. Plus il est proche de la catégorie visée et plus il pourra échanger et les représenter face à des représentants de l’employeur locaux (souvent des managers).

Des acteurs créés par accord et dont les missions s’adaptent aux différentes structures

Les représentants de proximité sont prévus par la loi mais ils ne sont pas obligatoires. Seul un accord collectif d’entreprise peut prévoir :

  • le nombre de représentants de proximité,
  • leurs attributions -notamment en matière de santé, sécurité et conditions de travail,
  • leurs modalités de désignation
  • leurs modalités de fonctionnement (article L2313-7 du Code du travail).

Le législateur impose seulement que la durée des mandats des représentants de proximité soit fixée sur la durée des mandats des membres élus du CSE. En principe, ils sont désignés lors de la première réunion, leurs mandats courent jusqu’aux prochaines élections. Voici donc une des seules choses imposées par le législateur concernant les représentants de proximité.

Au regard du peu d’éléments fournis dans la loi, les représentants de proximité peuvent donc avoir des régimes de fonctionnement très différents d’une entreprise à une autre. Les exemples sont nombreux, puisque les partenaires sociaux ont dû négocier, dans la totalité, le régime de ces représentants. Par exemple, l’analyse des différents accords fait apparaître que les représentants de proximité sont très souvent titulaires et qu’aucun suppléant n’est prévu par accord. Or, il s’agit d’une possibilité que certains accords envisagent.

De plus, le nombre de représentants est totalement aléatoire puisqu’il s’agit d’une règle négociée au niveau de chaque entreprise. Parfois, ils sont très nombreux, ce qui inquiète les membres du comité social et économique, en évoquant le risque d’un pouvoir décentralisé auprès d’un acteur dont on ne maitrise pas les caractéristiques. D’autres fois, ils ne sont pas jugés suffisamment nombreux. Dans ce cas, il est très probable que les partenaires sociaux aient préféré débuter l’expérience avec un nombre restreint d’acteurs locaux.

L’accord d’entreprise pose donc le régime de ces représentants et en prévoit leurs droits et obligations, ainsi que leur mode de fonctionnement interne.

Représentants de proximité : fonctionnement de l’instance

L’accord d’entreprise prévoit la périodicité et les caractéristiques des échanges entre les représentants de proximité et l’employeur ou son représentant local.

Le plus souvent, le comité social et économique délègue les réclamations individuelles et collectives et à ce titre, les représentants doivent avoir alors la possibilité de les transmettre à l’employeur. Cet échange n’est pas calqué sur les anciennes règles de fonctionnement des délégués du personnel, puisqu’ils n’en sont pas. L’accord peut donc prévoir des modalités spécifiques.

Ces échanges peuvent donc être mensuels ou non. Certains accords prévoient des échanges 10 fois dans l’année, évinçant alors les mois d’été. D’autres, au contraire, peuvent prévoir des réunions une fois par trimestre. Le champ est libre et les partenaires sociaux pourront donc opter pour la meilleure solution envisagée.

En outre, le formalisme de ces réunions n’est pas défini par le législateur. Parle-t-on réellement de questions ? ou de thèmes ? Ces échanges doivent-ils être retranscrits dans un registre ? Ces éléments restent à l’appréciation des partenaires sociaux qui en définiront les contours.

Enfin, il est assez fréquent que le comité social et économique délègue aux représentants de proximité des missions en santé et sécurité, comme les inspections ou encore les accidents après accident du travail/maladie professionnelle. Dans ce cas, l’accord peut tout à fait prévoir que des réunions spécifiques en santé/sécurité soient organisées au niveau local avec ces représentants de proximité. Les possibilités sont nombreuses et le rôle à jouer par ces représentants dépend donc des négociations.

Des salariés protégés et des droits associés

Le représentant de proximité, même s’il n’est pas directement élu par les salariés bénéficie au titre de son mandant d’une protection. On dit même que le représentant de proximité est un « salarié protégé ». Pendant toute la durée de son mandat et jusqu’à 6 mois après, l’employeur ne peut pas engager de procédure à son encontre, sans obtenir l’autorisation de l’inspecteur du travail.

Cette protection concerne le licenciement mais aussi l’ensemble des ruptures à l’initiative de l’employeur. De plus, il est aussi protégé contre un simple changement des conditions de travail (exemple : horaires) ou encore une modification d’un élément essentiel de son travail (exemple : mutation à 200 km). L’employeur ne pourra jamais lui imposer, pendant son mandat, ces changements contractuels.

Le représentant de proximité doit donc pouvoir exercer son mandat en toute sérénité. C’est pourquoi, il ne doit pas non plus subir de discrimination. Aussi, les décisions professionnelles ne doivent pas être prises au prisme de son mandat. Il doit donc bénéficier d’une égalité de traitement par rapport aux autres salariés.

En outre, afin d’exercer correctement sa mission, le représentant de proximité doit disposer de moyens spécifiques. Déjà, il doit pouvoir se déplacer librement dans l’entreprise mais aussi à l’extérieur. Mais, surtout, l’accord doit prévoir un nombre d’heures de délégation suffisantes. Or, certains accords ne prévoient pas ces heures de délégation et dans ce cas, le représentant de proximité peut rencontrer des difficultés pour l’exercice de son mandat. Dans ce dernier cas, l’accord peut alors prévoir que les représentants soient nécessairement des élus du comité social et économique. Les heures de délégation peuvent alors être mutualisées entre les membres. Aussi, le représentant de proximité peut donc jouir de ses propres heures s’il est titulaire ou d’heures mutualisées.

Des incertitudes…

Les représentants de proximité sont prévus directement par un accord collectif et le code du travail est très laconique sur les missions et les prorogatives de ces nouveaux acteurs. Or, les partenaires sociaux n’ont pas pu anticiper toutes les situations lors de ces premières négociations sur les représentants de proximité. En effet, pour la première fois, ils ont eu en charge la création d’un régime, sans aucune règle supplétive dans le Code du travail.

Il existe donc toujours des incertitudes. Déjà, ces représentants peuvent être désignés au sein des élus ou parmi les salariés. Aussi, de simples salariés peuvent donc être des représentants de proximité. Si l’accord ne prévoit un nombre d’heures de délégation suffisant, les salariés ne pourront pas exercer correctement leur mandat alors qu’ils ne disposent pas d’heures de délégation. De même, les interactions avec le comité social et économique peuvent être compliquées quand ils n’en sont pas membres. A contrario, quand le représentant est membre du comité social et économique, il peut être difficile pour lui de trouver du temps pour l’exercice de cette mission, car il a aussi des obligations au titre de l’ex-CE et de l’ex-CHSCT. Ainsi, au lieu de le décharger, cette double mission risque de lui peser.

La désignation des représentants de proximité est donc un premier point qui pose problème,  et que les partenaires sociaux doivent dorénavant anticiper. En outre, le nombre de ces représentants doit être correctement évalué pour qu’il réponde efficacement aux besoins du comité social et économique, sans par exemple le « cannibaliser » auprès des salariés.

Enfin, la répartition des sujets liés à la santé et la sécurité au travail par les élus est un véritable enjeu que les accords ne détaillent pas toujours suffisamment. En effet, il existe trois acteurs de la santé et la sécurité du côté des représentants : le CSE, la CSSCT et potentiellement le représentant de proximité. Les missions de ce dernier dans le domaine de la santé et la sécurité doivent être clairement identifiées ainsi que les liaisons avec le CSE pour que son rôle ait un impact au sein de la structure.

Ainsi, le représentant est un nouvel acteur, dont le régime est prévu par accord d’entreprise. Il n’est donc pas présent dans toutes les entreprises et selon, il a des rôles qui diffèrent. Seule la pratique permettra de régler les problèmes rencontrés dans la définition de son régime conventionnel. Les partenaires sociaux font leurs premières armes dans le domaine et attendent maintenant les retours d’expérience, afin d’ajuster les règles posées. Dans l’avenir, cet acteur va donc connaitre des évolutions.

Qu'avez-vous pensé de cet article ?

Note moyenne de 0/5 basé sur 0 avis

Soyez le premier à donner votre avis

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *