RPS et PSE : quelle est la responsabilité de l’employeur ?

Les dernières décisions du Conseil d’État en date du 23 mars mettent en lumière les obligations de l’employeur, lors d’un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE), notamment au niveau des risques psycho-sociaux (CE, 21.03.2023, n° 450012 et n° 460660).

La notion même de risques psychosociaux et ses contours diffèrent parfois d’un auteur à l’autre et les employeurs peuvent aussi, être un peu perdus – notamment lorsque la définition n’est pas clairement encadrée.

Et pourtant, l’employeur est le responsable de la sécurité des salariés. Cette obligation a, elle aussi, un périmètre qui a évolué et l’employeur, alors même qu’il est de bonne foi, ne maîtrise pas toujours les enjeux de cette obligation.

Les deux arrêts du Conseil d’État sont donc l’occasion de présenter ces différents domaines, les définir et présenter la place du dialogue social sur ces sujets.

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RPS et PSE : quelle est la responsabilité de l’employeur ?
L’employeur a l’obligation d'assurer la sécurité de ses collaborateurs.

La responsabilité de l’employeur en termes de santé et sécurité

Quand un salarié exerce ses missions, l’employeur a l’obligation de lui assurer sa sécurité. Il s’agit d’une obligation de sécurité. Celle-ci s’est transformée au fil du temps, puisque les juge en ont affiné les contours.

Cette obligation signifie que l’employeur doit prendre toute mesure conservatoire nécessaire en cas de réalisation d’un risque pour faire cesser le trouble. Mais, l’employeur doit aussi mettre tout en œuvre pour qu’il ne se réalise pas et prévoir donc de la prévention. Pour ceci, il a pour obligation d’évaluer le risque, informer et former les collaborateurs et consigner l’ensemble (article L 4121-1 du code du travail).

Initialement, cette obligation de sécurité s’appréhendait uniquement sous l’angle du résultat, c’est-à-dire que l’employeur devait assurer la sécurité et en cas de contentieux, le juge vérifiait uniquement que le résultat était atteint. Les employeurs étaient donc toujours condamnés lorsque le salarié était victime d’un risque.

Cette situation était protectrice du salarié mais les employeurs étaient parfois lassés par les risques judiciaires, d’autant plus lorsqu’il s’agissait d’un risque psychologique ou social.

En 2015, un revirement de jurisprudence a fait évoluer l’obligation de sécurité de résultat vers une obligation de moyens renforcés – l’accent étant alors mis sur la prévention. L’employeur peut donc s’exonérer de sa responsabilité s’il rapporte la preuve qu’il a mis tout en œuvre en termes de prévention et d’accompagnement du risque (Cass. Soc. 25 novembre 2015, « Air France », n°14-24444).

Autant la mise en œuvre d’actions de l’employeur pour limiter et prévenir les risques peut être facilement envisageable concernant les risques physiques autant les risques psychosociaux sont parfois plus difficilement identifiables et les actions de l’employeur doivent être complètement adaptées au contexte.

Les risques psychosociaux : un véritable enjeu pour l’employeur

La notion de risques psychosociaux couvre de larges situations, comme la surcharge de travail, le harcèlement sexuel, moral ou encore le stress… Chacun de ces domaines a ses propres mécanismes et nécessite une approche spécifique.

Il est donc essentiel de déterminer clairement les différentes réalités des risques psychosociaux.

Avant tout, il convient de poser que la notion de risques psychosociaux renvoie à des risques qui impactent la santé physique et sociale des salariés. En effet, si l’on reprend la définition de la santé proposée par l’organisation mondiale de la santé, il s’agit d’« un état complet de bien-être physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de maladie et d’infirmité ». L’employeur doit donc assurer aux salariés un bien-être physique mais aussi mental et social. Ces deux derniers aspects sont déterminants dans la définition des risques psychosociaux.

Ces risques psychosociaux sont alors le résultat de situations dégradées entre le salarié et sa situation de travail car il subit des pressions, du stress, de la surcharge de travail, des violences internes et externes… Ces différentes situations entraînent alors des désagréments d’ordre social, psychologique et même physique.

L’employeur doit alors les identifier, les évaluer et prendre toute mesure utile pour les faire disparaître.

De la prévention primaire à la prévention tertiaire : une solution pour limiter la responsabilité de l’employeur

L’employeur doit donc aborder les risques psychosociaux sous l’angle la prévention. A ce titre, la prévention se présente sous trois volets. On distingue la prévention primaire, la prévention secondaire et la prévention tertiaire.

Concernant la prévention primaire, elle agit sur la cause profonde du risque et vise alors à éviter la formation du risque par des actions collectives et générales.

La prévention secondaire, quant à elle, a pour objectif de réduire les conséquences du risque s’il se produit. Cette prévention est axée sur le risque et uniquement le risque, par le biais d’actions de prévention qui accompagneront le risque le cas échéant.

La prévention tertiaire vise à accompagner les conséquences du risque en cas de réalisation.

Par exemple, prenons la souffrance au travail. L’employeur doit prévenir le risque et les actions différents en fonction du niveau de prévention. Par exemple, s’il décide de proposer des actions de prévention primaire, il devra alors agir sur les différentes strates de management ou encore l’organisation du travail… En fonction de la source profonde de la souffrance, il prendra toute décision pour que ce risque- mais aussi l’ensemble des risques liées aux facteurs cités- n’apparaissent pas.

Si par contre, il envisage de se positionner sur la prévention secondaire, il proposera, par exemple, des formations relatives à la gestion du stress ou encore des informations et des formations sur l’organisation du travail.

La prévention tertiaire, quant à elle, concerne l’accompagnement du risque et il s’agira notamment de prévoir une cellule d’écoute psychologique ou un accompagnement spécifique si le risque se produit, comme la présentation de la liste des partenaires de l’employeur à contacter, le cas échéant.

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La place des représentants dans l’évaluation, la prévention et l’accompagnement des RPS

Les représentants du personnel ont un rôle à jouer dans la prévention des risques psychosociaux. Tel est le cas lorsque l’employeur établit un PSE, lors d’un « grand licenciement pour motif économique ». Ce PSE est en principe négocié avec les délégués syndicaux. Mais, il arrive que l’employeur et les délégués ne se mettent pas d’accord ou qu’il n’y ait pas de délégué dans l’entreprise, dans ce cas, le PSE est mis en œuvre unilatéralement par l’employeur et il nécessite une homologation de la part de la DREETS.

Grille de taux par défaut applicable aux contribuables domiciliés en métropole en 2019

A noter : les délais de contrôle de la DREETS varient selon le type de document. S il s’agit d’un accord collectif, la DREETS dispose d’un délai de 15 jours pour le valider ou pas. Par contre, lorsque le PSE est un document unilatéral de l’employeur, la DREETS dispose, dans ce cas, de 21 jours pour l’homologuer ou non.

Ce contrôle de la DREETS est détaillé dans l’arrêt du Conseil d’État en date du 21 mars 2023. Ce dernier rappelle alors que le contrôle est global et porte notamment sur la régularité de la procédure d’information / consultation. Dans ce cadre, la DREETS doit vérifier que l’employeur a transmis l’ensemble des informations au CSE, que ce soit lors de la convocation à sa première réunion ou en réponse aux remarques du CSE ou de l’administration. Le Conseil d’État précise de plus que ces informations portent notamment sur l’identification et l’évaluation des conséquences de la réorganisation de l’entreprise sur la santé ou la sécurité des travailleurs. De plus, l’employeur doit transmettre des mesures précises et concrètes, pour prévenir les risques identifiés, de façon à assurer la sécurité des salariés et protéger leur santé physique et mentale.

En ce sens, le Conseil d’État a estimé que le contrôle devait aussi être exercé lorsqu’il s’agissait d’une cessation d’activité et que tous les postes étaient supprimés, puisque la santé des salariés pouvaient être impactés.

Il y a donc deux volets à retenir. Le premier concerne le dialogue social et le rôle du CSE dans la prévention des risques psychosociaux lors d’une réorganisation. Celui-ci doit être suffisamment informé et il doit disposer d’une identification des risques et d’actions de préventions précises proposées par l’employeur.

Le deuxième volet concerne le niveau de contrôle de la DREETS. Elle doit réaliser un contrôle global et notamment vérifier la présence de mesures concrètes et précises pour lutter contre les risques psychosociaux mais elle n’est pas en charge d’une analyse in concreto, prenant en compte des éléments du contexte, comme le niveau d’investissement financier de la structure concernée.

Aussi, lors d’un PSE, les employeurs doivent prévoir un volet santé / sécurité en analysant spécifiquement les risques psychosociaux car une réorganisation multiplie les facteurs de RPS. Par cette décision, le Conseil d’État reconnaît l’importance des risques psychosociaux dans les transformations et réorganisations d’entreprise.

Les représentants du personnel doivent donc être associés à la démarche et analyser en concertation avec l’employeur les différents risques, leurs conséquences et les éléments de prévention à mettre en œuvre. Il est donc primordial pour l’employeur d’intégrer au sein du dialogue social ces réalités. A ce titre, le Conseil d’État a rappelé que l’employeur devait fournir des réponses argumentées aux remarques et propositions des élus dans ce domaine. Ainsi, l’employeur a tout intérêt de prévoir une politique de prévention adaptée.

Les risques psychosociaux sont encore aujourd’hui trop souvent sous-évalués et il devient essentiel pour l’employeur de les identifier et de prévoir des mesures concrètes pour les limiter. Ces deux arrêts le rappellent une fois de plus, dans un contexte anxiogène, le PSE.

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