Comment estimer la valeur d’une entreprise à l’aide d’indicateurs simples ?

L'estimation de la valeur d'une entreprise constitue une démarche complexe, nécessitant l'utilisation d'une variété d'indicateurs en fonction du secteur d'activité.

Cet article explore en détail trois principales approches d'évaluation : financière, comparative et patrimoniale.

Chacune de ces méthodes propose une perspective unique sur la valeur intrinsèque de l'entreprise, qu'il s'agisse de ses flux de trésorerie futurs, de comparaisons avec des opérations similaires ou de l'évaluation de son patrimoine.

En analysant ces différentes approches, nous mettrons en lumière les particularités et les avantages de chaque méthode, ainsi que l'importance de considérer une approche multidimensionnelle pour parvenir à une évaluation précise de la valeur d'une entreprise.

Comment estimer la valeur d’une entreprise à l’aide d’indicateurs simples ?
Les 3 types d'évaluations pour estimer la valeur d'une entreprise sont financière, comparative et patrimoniale.

3 familles d’évaluation

Il existe 3 familles d’évaluation des entreprises :

 

Type d’approche

Principe

Financière

Cette approche repose sur les revenus futurs que l’entreprise étudiée génère.
Elle est basée sur la recherche d’informations prévisionnelles.
La philosophie de cette approche est que « l’entreprise vaut ce qu’elle rapportera ».

Comparative

Cette méthode repose sur une comparaison avec des opérations ou transactions comparables.
La philosophie de cette approche est « l’entreprise vaut ce que des actifs comparables sont effectivement payés ».

Patrimoniale

Selon cette approche, la valeur de l’entreprise est égale à celle du patrimoine qu’elle détient.
L’entreprise a une valeur égale à l’ensemble des éléments d’actifs corporels et incorporels qu’elle détient.
La philosophie d’évaluation de cette approche est « l’entreprise vaut ce qu’elle possède ».

Estimer la valeur d’une entreprise par l’approche financière 

Les principes de la méthode

L’approche financière consiste à évaluer une entreprise en fonction des flux de trésorerie qu’elle génèrera à l’avenir. La méthode la plus connue est la méthode DCF (Discounted Cash Flows). Elle est basée sur le calcul des flux de trésorerie actualisés ou « Free cash flows ».

La méthode se base généralement sur une évaluation des « operating cash flows » (flux de trésorerie opérationnels) sur 5 années. On procède aux différentes étapes suivantes :

  1. Évaluation pour les 5 années à venir des CAF (capacité d’autofinancement) qui correspondent à la trésorerie potentielle générée par l’activité de l’entreprise.
    CAF simplifiée = résultat net + dotations aux amortissements
  2. Détermination des operating cash flows = CAF – Variation BFR
    Le besoin en fonds de roulement correspond au décalage de trésorerie issu du cycle d’exploitation et lié aux délais des paiements des clients et fournisseurs et à la rotation des stocks.
    Du fait de la déduction de la variation du BFR, l’operating cash flow correspond aux flux de trésorerie réels générés par l’activité opérationnelle.
  3. Détermination des free cash flows (FCF)
    Free cash flows (FCF) = Operating cash flows – Investissements nets de cession (ou CAPEX)
    Le free cash flow correspond au flux de trésorerie généré au cours de l’exercice après déduction des investissements réalisés dans l’année.
  4. Les free cash flows sont ensuite actualisés à partir du coût moyen pondéré du capital et additionnés.
  5. La valeur finale est obtenue en additionnant aux free cash flows actualisés, une valeur terminale de l’entreprise en fin d’horizon en fonction des flux calculés pour la dernière année du prévisionnel.

Exemple (en millions €)

Afin d’évaluer la société Orna, on évalue son operating cash flow et son free cash flow prévisionnel sur 5 ans. On retient un taux d’actualisation de 10 % et un taux de croissance de 1 %.

N+1

N+2

N+3

N+4

N+5

Capacité d’autofinancement

10

12,5

15

16,5

19

(-) Variation du BFR

2,9

1,2

1

0,8

0,9

(=) Operating cash flow

7,1

11,3

14

15,7

18,1

(-) Investissements

6,5

8

11

10

12

(=) Free cash flow

0,6

3,3

3

5,7

6,1

Free cash flow actualisé (10 %)

0,55

2,73

2,25

3,89

3,79

Free cash flow = 0,6 x (1,1)-1 + 3,3 x (1,1)-2 + 3 x (1,1)-3 + 5,7 x (1,1)-4 + 6,1 x (1,1)-5 = 13,21 millions €.

Valeur terminale = (6,1 x 1,01) / (0,10 – 0,01) = 68,46 millions €

Valeur terminale actualisée = 68,46 x (1,10)-5 = 42,51 millions €

Valeur totale de la société = 13,21 + 42,51 = 55,71 millions €.

Les difficultés de la méthode

La mise en place de cette méthode rencontre souvent des difficultés. Elle nécessite de réaliser des évaluations futures, souvent à partir de données financières passées et réalisées dans un contexte et un environnement qui seront peut-être différents pour les années à venir. La principale limite de la méthode tient ainsi au caractère incertain des données servant de base à l’évaluation.

La méthode comparative pour estimer la valeur d’une entreprise

Les principes de la méthode

L’approche comparative consiste à valoriser une entreprise en la comparant avec un échantillon de référence constitué d’entreprises vendues récemment dans un secteur de même nature ou proche.

On calcule alors pour les sociétés constituant l’échantillon, un multiple :

 

Document sans nom

Multiple = Valeur de l’entreprise / Critère retenu

Les critères retenus les plus courants sont le chiffre d’affaires, l’EBE (ou EBITDA) le résultat d’exploitation (ou EBIT) et le résultat net.

Pour les non-initiés à la finance, c’est probablement la méthode la plus simple à comprendre. C’est à partir de cette méthode que de nombreux commerces de proximité sont estimés en pourcentage d’une année de chiffre d’affaires (souvent entre 70 et 110 %).

À partir de ce multiple, on peut calculer la valeur de la société :

 

Document sans nom

Valeur d’une société = Multiple moyen x Critère appliqué à cette société

Les étapes de cette méthode sont les suivantes :

  1. Constitution d’un échantillon d’entreprises comparables du même secteur et vendues récemment
  2. Identification des indicateurs de performance pertinents
  3. Application des multiples
  4. Application éventuelle d’un coefficient de risque spécifique à la société et/ou au secteur.

Exemple

On cherche à évaluer la société Aracno dont le capital est composé de 50 000 titres avec un emprunt restant dû de 100 000 €. Afin d’utiliser la méthode comparative, 4 sociétés au profil similaire ont été retenues, avec les résultats suivants :

 

Document sans nom

Indicateur

Multiple moyen fin N

Chiffre d’affaires

1,3

Résultat d’exploitation

10

Résultat net

15

Capacité d’autofinancement

11

Multiple moyen = Valeur de vente de la société / Indicateur

Ainsi, en moyenne, les 4 sociétés ont été vendues à hauteur de 1,3 fois leur chiffre d’affaires.

Ces indicateurs pour la société Aracno sont les suivants :

 

Document sans nom

Indicateur

Montant
Société Aracno
fin N

Chiffre d’affaires

600 000

Résultat d’exploitation

80 000

Résultat net

50 000

Capacité d’autofinancement

70 000

En appliquant les multiples moyens aux indicateurs d’Aracno, on peut évaluer la valeur d’une part sociale de la manière suivante :

 

Indicateur

Multiple moyen fin N (1)

Montant Société Aracno fin N (2)

Valeur Aracno
(3) = (1) x (2)

Dette

Valeur des capitaux propres

Valeur
d’une part

Chiffre d’affaires

1,3

600 000

780 000

100 000

680 000

13,6

Résultat d’exploitation

10

80 000

800 000

100 000

700 000

14

Résultat net

15

50 000

750 000

750 000

15

Capacité d’autofinancement

11

70 000

770 000

770 000

15,4

La valeur de la part de la société est donc comprise entre 13,60 et 15,40 €.

La dette ne doit être déduite que pour les indicateurs où les intérêts de ne sont pas déduits, comme pour le chiffre d’affaires et le résultat d’exploitation. Ce serait également le cas pour l’EBITDA et l’EBIT.

La dette n’est en revanche pas déduite pour le résultat net et la CAF.

Les difficultés de la méthode 

Cette méthode est celle la plus couramment admise dans les évaluations, mais elle souffre de plusieurs difficultés tenant principalement à la difficulté de constituer un échantillon. Les données financières sur les transactions relatives à des ventes d’entreprises ne sont pas toujours rendues publiques. Les données comptables de ces entreprises, pour évaluer les multiples ne sont pas non plus toujours publiées.

En outre, trouver des entreprises directement comparables à la société à évaluer s’avère parfois compliquer. Les effectifs, les clientèles, l’expérience et les compétences des ressources humaines sont souvent très différents.

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Estimer la valeur d’une entreprise par l’approche patrimoniale

Les principes de la méthode

L’approche patrimoniale consiste à évaluer une société à partir de son patrimoine actif et passif, tout en intégrant les perspectives futures. Cette dernière notion est appelée goodwill.

Selon cette méthode :

Valeur de l’entreprise = ANCC (hors fonds de commerce) + GW (good will)

ANCC = actif net comptable corrigé = Capitaux propres – Actifs fictifs + Plus-values latentes +/- Impôts différés

La valeur du good will peut notamment être calculée selon la méthode des praticiens (ou méthode indirecte ou méthode allemande).

Selon cette méthode, la valeur du good will est obtenu en faisant la moyenne entre :

  • l’ANCC hors fonds de commerce (valeur limite inférieure)
  • la valeur de rendement (VR, valeur limite supérieure)
    VR = Bénéfice courant net d’IS / taux de rentabilité des capitaux propres

Good will = (VR – ANCC) / 2

Exemple :

Une société dispose de capitaux propres de 5,4 millions €. Aucun actif fictif ni impôt différé n’est repéré. En revanche, une construction apparait au bilan pour 300 000 € en valeur nette comptable. Un expert immobilier l’évalue désormais à 700 000 €. Le good will est évalué par plusieurs experts à 1,3 million €.

ANCC = Capitaux propres + plus-values latentes = 5,4 millions + (700 000 – 300 000) = 5,8 millions €.

Valeur de l’entreprise = 5,8 millions + 1,3 million = 7,1 millions €.

Cette méthode a pour avantage de tenir compte du patrimoine de la société. Les éléments financiers sont en outre relativement simples à trouver pour faire les évaluations. En revanche, l’évaluation du good will pour tenir compte de l’avenir de la société peut se faire selon de nombreuses méthodes et avec des paramètres très divers rendant son évaluation incertaine.

Une bonne évaluation d’une société s’obtient en faisant la moyenne de 2 voire 3 familles d’évaluation.

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