Partager la publication "Passeport de prévention : son alimentation est obligatoire pour les organismes de formation depuis le 1er septembre"
1. Qu’est-ce que le passeport de prévention ?
L’objectif poursuivi par le législateur est de recenser, via un passeport numérique individuel, l’ensemble des formations relatives à la santé et à la sécurité au travail ainsi que les attestations, certificats et diplômes obtenus par les travailleurs à la suite de ces formations. Ce passeport concerne tous les travailleurs (salariés, stagiaires, etc.) ainsi que les demandeurs d’emploi. Le but recherché est, notamment, de faciliter la circulation, entre les employeurs et les salariés, de l’information sur les formations suivies, les compétences acquises et les certificats obtenus. Plus précisément, il s’agit de :
- Favoriser l’approche préventive et améliorer la protection et l’encadrement des travailleurs ;
- Eviter les doublons et la récurrence de formations déjà suivies par le passé ;
- Faciliter la preuve que le salarié a bien suivi une formation pour permettre l’exécution d’un contrat de travail sans risque. En cas d’accident du travail, il permettra également de vérifier si l’employeur a, ou non, respecté ses obligations légales, et, notamment, si l’accident est lié à un sujet évoqué dans une formation non suivie par le salarié.
Le passeport de prévention est d’ailleurs intégré dans le dispositif plus large du passeport dit « de compétences », qui regroupe toutes les données personnelles sécurisées relatives à la formation professionnelle du titulaire (formations initiales et continues, diplômes).
Il est à noter que, lors de sa création, le passeport de prévention a suscité des inquiétudes de la part d’organisations syndicales de salariés, qui ont émis la crainte de voir le passeport de prévention se transformer de facto en passeport pour l’emploi. En effet, pour les demandeurs d’emploi, le passeport pourrait devenir un critère de sélection supplémentaire, selon qu’ils ont suivi, ou non, une formation en matière de santé et sécurité au travail. Sans doute pour éviter un tel écueil, un décret (n° 2022-1712) du 29 décembre 2022 a expressément précisé que le passeport de prévention ne doit pas être un moyen de contrôle des compétences des salariés, ni constituer un prérequis obligatoire à tout recrutement des salariés.
2. Quel est le calendrier de déploiement du passeport de prévention ?
Ce dispositif devait initialement entrer en application au plus tard le … 1er octobre 2022. Mais, en raison de l’adoption tardive des textes d’application, il n’est que partiellement opérationnel depuis le 30 mai 2023, date depuis laquelle seules les formations ayant donné lieu à une certification ont été versées automatiquement dans la partie accessible aux titulaires du compte de prévention. En février 2025, le ministère du Travail a dévoilé un nouveau calendrier, et l’ouverture du service se fait de manière progressive : il est opérationnel, et même obligatoire, depuis le 1er septembre 2025 pour les organismes de formation, et devrait l’être en 2026 pour les employeurs (au plus tard le 31 mars 2026) et les salariés (au 4ème trimestre).
Il est à noter que le fonctionnement du passeport de prévention n’est pas rétroactif : seules les formations délivrées aux travailleurs à partir de l’ouverture de l’espace de déclaration doivent être déclarées.
Pour préparer le développement du passeport de prévention, le ministère du Travail a mis en place un site d’information dédié : https://passeport-prevention.travail-emploi.gouv.fr/
3. Quelles sont les formations concernées par le passeport de prévention ?
Les formations concernées par le passeport de prévention sont les formations relatives à la santé et à la sécurité au travail dispensées en interne au sein de l’entreprise ou en externe par des organismes de formation ou de certification (y compris les formations en lien avec la santé et la sécurité dispensées à l’étranger). Le but est de donner la priorité à l’intégration des formations transférables d’une entreprise à une autre, notamment celles rendues obligatoires par le Code du travail (amiante, travaux sous tension, travail en milieu hyperbare notamment).
En tout état de cause, les organismes de formation ayant l’obligation, depuis le 1er septembre dernier, d’alimenter le passeport de prévention, un décret du 1er août 2025 a apporté des précisions sur les formations qui doivent faire l’objet d’une déclaration dans le passeport de prévention. Ce sont les formations qui, de manière cumulative :
- poursuivent un objectif de prévention des risques professionnels ou répondent à l’obligation générale de formation des travailleurs conformément à l’article L. 4121-1 du code du travail ;
- Donnent lieu à la délivrance d’une attestation de formation ou d’un justificatif de réussite au titulaire d’un compte personnel de formation qui en a bénéficié ;
- Permettent la mobilisation de connaissances et compétences acquises ou développées lors de la formation et transférables sur tout autre poste de travail exposant à des risques professionnels similaires à ceux présents sur le poste de travail occupé par le travailleur à la date de la formation.
Ce même décret a précisé les formations qui ne doivent pas faire l’objet d’une déclaration dans le passeport de prévention. Ce sont les formations suivantes :
- les formations de formateurs leur permettant de dispenser des formations relatives à la prévention des risques professionnels ;
- La formation à la sécurité relative aux conditions d’exécution du travail prévue à l’article R. 4141-13 du code du travail. Est ici visée la formation à la sécurité dont doit bénéficier tout salarié, notamment lors de sa prise de poste ;
- Les formations permettant d’assurer la sécurité des personnes et des biens, à l’exception de :
- La formation de sauveteur secouriste du travail prévue à l’article R. 4224-15 du code du travail ;
- Les formations complémentaires à des formations relatives à la protection des personnes ou des biens visant à développer des connaissances et compétences particulières permettant d’intervenir dans des situations exposant à des risques professionnels spécifiques.
- La formation en santé, sécurité et conditions de travail prévue à l’article L. 2315-18 du code du travail. Est concernée la formation en santé et sécurité dont bénéficient les membres de la délégation du personnel au Comité Social et Économique et le référent en matière de lutte contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes désigné par le CSE ;
- Les formations de préventeurs, à l’exception des formations complémentaires particulières telles que celles de salarié compétent mentionné à l’article L. 4644-1, de personne compétente en radioprotection mentionnée à l’article R. 4451-103 ou de conseiller à la prévention hyperbare mentionnée à l’article R. 4461-4 du code du travail.
Un simulateur est mis à disposition des utilisateurs pour déterminer si la formation doit être renseignée dans le passeport de prévention.
4. Comment est alimenté le passeport de prévention ?
Une alimentation automatique du passeport de prévention est prévue via le système d’information du Compte Personnel de Formation. Il s’agit, notamment, des certifications professionnelles en santé et sécurité au travail enregistrées par France compétences dans le RNCP (répertoire national des certifications professionnelles), des formations en matière de santé et sécurité au travail financées par un Opco (opérateur de compétences), une commission paritaire interprofessionnelle,..
A coté de cette alimentation automatique, la plateforme numérique consacrée au passeport de prévention prévoit la mise en place de trois espaces distincts, avec des accès dédiés pour les organismes de formation, les employeurs et les salariés.
Les organismes de formation ont l’obligation, depuis le 1er septembre 2025, de déclarer, dans l’espace qui leur est dédié, les formations qu’ils dispensent en matière de santé et de sécurité au travail, qui répondent aux conditions ci-dessus décrites, en respectant les échéances suivantes :
- Avant l’échéance d’un délai de trois mois suivant la fin du trimestre au cours duquel la formation s’est terminée, pour les formations donnant uniquement lieu à la délivrance d’une attestation de formation ;
- Avant l’échéance d’un délai de trois mois suivant la fin du trimestre au cours duquel débute la validité du justificatif de réussite délivré au titulaire.
Si les formations dispensées par les organismes de formation l’ont été à l’initiative de l’employeur, ce dernier peut vérifier la véracité et la complétude de la déclaration de l’organisme de formation jusqu’à l’échéance d’un délai de six mois suivant la fin du trimestre au cours duquel la formation s’est terminée ou au cours duquel débute la validité du justificatif de réussite délivré au titulaire. Dans ce délai, l’employeur peut demander à l’organisme de formation de corriger ou de compléter sa déclaration avant l’expiration de ce délai. En l’absence de vérification de l’employeur dans ces délais, la déclaration est réputée vérifiée dans le passeport de prévention du titulaire.
L’employeur aura l’obligation, à partir de l’ouverture du service dématérialisé dédié aux déclarations des employeurs (au plus tard le 31 mars 2026), d’alimenter le passeport pour les formations qu’il aura pris l’initiative d’organiser en interne :
- Avant l’échéance d’un délai de six mois suivant la fin du trimestre au cours duquel la formation s’est terminée, pour les formations donnant uniquement lieu à la délivrance d’une attestation de formation ;
- Avant l’échéance d’un délai de six mois suivant la fin du trimestre au cours duquel débute la validité du justificatif de réussite délivré au titulaire.
Enfin, le salarié (ou le demandeur d’emploi), titulaire du compte, aura le choix :
- D’activer son passeport dit « de compétences » auquel est intégré le passeport de prévention ;
- D’alimenter son passeport de prévention pour les formations qu’il aurait suivies de sa propre initiative.
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5. Qui peut consulter le passeport de prévention ?
Le passeport de prévention est un outil géré par son titulaire. Le salarié a bien évidemment accès de plein droit à la totalité du passeport, et c’est à lui qu’il appartient de décider ce qu’il souhaite rendre consultable et communicable à son employeur ou à un futur employeur : il pourra refuser ou accorder totalement ou partiellement l’accès aux données intégrées dans le passeport de prévention. Un arrêté à paraître doit fixer les modalités et conditions d’accès au passeport de prévention.
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Le passeport de prévention instituée par la loi du 2 août 2021 entre donc dans sa phase opérationelle. Il ne faut d’ailleurs pas perdre de vue que l’esprit de cette loi est de faire en sorte que la prévention prime sur la réparation des AT/MP. En outre, la ministre du travail a rappelé à plusieurs reprises depuis le début de l’année qu’elle souhaitait renforcer la mobilisation contre les accidents graves et mortels, notamment en mobilisant de manière accrue le levier de la formation pour renforcer la culture de prévention en entreprise.