Partager la publication "Générations au travail : sortir de la focalisation sur la Gen Z et miser sur la collaboration intergénérationnelle"
Les différentes générations présentes en entreprise
De manière inédite, quatre générations se retrouvent à travailler ensemble. Mais qu’entend-on par « génération » ?
Il s’agit d’un ensemble constitué de personnes nées et vivant à peu près à la même époque et partageant des expériences sociales, culturelles et historiques similaires. Cela crée souvent des marqueurs historiques communs et un cadre référentiel assez proche, influençant ainsi la construction de l’identité de ces personnes.
Voyons plus en détails les générations présentes aujourd’hui dans le monde du travail.
Les « baby boomers »
Née entre 1946 et 1964, cette génération est celle d’après-guerre, qui a grandi durant les Trente Glorieuses, période de forte croissance économique et de plein emploi. Marquée par l’essor de la société de consommation, cette génération a connu un environnement relativement stable et porteur d’opportunités.
La génération X
Nés entre 1965 et 1980, ils ont grandi dans un contexte de ralentissement économique (chocs pétroliers), de déclin du plein emploi et de mutation des repères sociaux.
La génération Y – Les « Millenials »
Née entre 1981 et 1994, la Gen Y a grandi avec l’arrivée progressive d’Internet. Elle est la première génération à avoir questionné la place du travail dans nos vies, en revendiquant davantage d’équilibre, de sens et de flexibilité. En particulier car elle a subi de plein fouet la crise des « subprimes » de 2008 et ses conséquences. Là où on lui promettait le sacro-saint CDI, elle a rencontré la précarité et l’enchaînement des CDD dès le début de sa carrière.
La génération Z – les « Digital natives »
Nés entre 1995 et 2010, ils n’ont pas connu le monde d’avant Internet, les réseaux sociaux et les smartphones. Leur monde à eux est hyper connecté. Mais il est aussi le théâtre de nombreuses crises : climatique, géopolitique, sanitaire, économique, sociale… Leur rapport au travail se caractérise par une forme d’agilité, une tolérance moindre à l’autorité verticale, et parfois une vision plus court-termiste, liée à l’imprévisibilité du monde dans lequel ils évoluent. Ils peuvent s’inscrire en rupture par rapport aux générations précédentes. Ce qui explique que l’attention se porte autant sur eux.
Alors bien sûr, ce n’est pas parce que l’on appartient à une génération d’un point de vue de son année de naissance que l’on va forcément se reconnaître dans le descriptif de ladite génération. Mais il est possible de s’accorder sur le fait que vivre des évènements historiques à peu près au même âge peut avoir incidence sur la construction de son mode de fonctionnement et de son référentiel.
Pourquoi miser plutôt sur la collaboration intergénérationnelle ?
Finalement, on peut se demander si les aspirations de la Gen Z ne seraient pas le reflet des nouvelles attentes générales sur le marché du travail.
En effet, en 2025, nous sommes cinq ans après une crise sanitaire majeure et mondiale qui a complètement rebattu les cartes. La période du covid, en imposant un ralentissement voire une mise à l’arrêt de certaines activités nous a tous et toutes poussés à nous interroger sur notre rapport au travail et la place que celui-ci occupe dans nos vies. Même si tout le monde n’a pas forcément traversé une crise de sens, des questionnements sur le travail ont émergé.
Ce n’est pas anodin si les cas de burn out (surchauffe), bore out (ennui) et brown out (manque de sens) explosent depuis.
Et il n’y a pas que la Gen Z qui en souffre.
De plus, en poursuivant le classement des collaborateurs par génération, il y a un risque d’étiquetage, de généralisation et de reproduire des stéréotypes qui enferment. Et qui sont un obstacle à la collaboration dans l’entreprise.
Il peut y avoir également le risque que certaines personnes dans l’entreprise se sentent ciblées ou stigmatisées (Gen Z). Tandis que d’autres, au contraire, se sentent laissées de côté (les autres générations).
Enfin, la collaboration intergénérationnelle apporte plusieurs bénéfices :
- Une diversité de pensée
- Une meilleure performance
- De la complémentarité
- De la transmission
- L’entretien de la culture d’entreprise
Comment favoriser la collaboration intergénérationnelle ?
Alors, maintenant que nous avons établi qu’il était important de ne pas raisonner uniquement en termes de générations, comment s’assurer que les salariés collaborent efficacement, peu importe leur âge ?
Voici quelques pistes.
Communiquer
Comme pour beaucoup de sujets, une communication de qualité est l’ingrédient de base.
Il est important de rappeler que l’écoute active et l’empathie sont des outils précieux pour réellement entrer en connexion avec l’autre. Cela implique le fait de se décentrer de ses propres préoccupations pour se concentrer sur celles de son interlocuteur (le temps de l’échange), de ne pas interrompre, de reformuler…
Rappeler ces principes et inciter vos collaborateurs à les appliquer permet une communication de meilleure qualité.
Ensuite, il est intéressant de créer des espaces d’écoute et de partage pour tous. Des espaces pour permettre à chacun d’exprimer ses attentes, son mode de fonctionnement en termes de communication, de travail, d’organisation…
Et pour favoriser des discussions constructives et utiles, il faut que l’entreprise garantisse la sécurité psychologique. D’après Amy Edmondson, chercheuse et professeure de Leadership à Harvard, la sécurité psychologique, c’est la conviction partagée, au sein d’une équipe, que chacun peut s’exprimer librement – poser des questions, partager des idées, reconnaître ses erreurs – sans craindre d’être rejeté ou pénalisé.
Par exemple, le groupe Pernod Ricard a sensibilisé 3000 de ses collaborateurs sur ce concept de sécurité psychologique.
Pour favoriser la collaboration entre les générations, il est intéressant de créer des réseaux intergénérationnels internes. C’est ce que propose par exemple Toyota avec le groupe interne « One Generation », qui permet de réfléchir aux atouts de l’intergénérationnel, de casser les silos entre générations dans l’entreprise et de favoriser la collaboration. Ou encore le groupe BNP Paribas avec le réseau WeGenerations.
Sensibiliser
Quand on parle de générations et donc d’âge, le sujet des biais inconscients et des stéréotypes n’est jamais loin. En effet, l’âge est l’une des caractéristiques sur lesquelles nous avons le plus de stéréotypes dans notre société. Que les personnes soient jeunes ou plus seniors, elles sont souvent considérées à travers le filtre de leur âge. Or les stéréotypes enferment. Et lorsqu’ils sont intériorisés par la personne qui en est l’objet, ils peuvent aller jusqu’à créer des comportements ayant un impact néfaste sur la santé. C’est le sujet que développe l’article « Les stéréotypes âgistes peuvent-ils tuer ? », disponible sur le site du groupe Oui Care.
Il est donc important de générer des prises de consciences et de sensibiliser sur ce sujet. Ce que fait très bien l’atelier « La Fresque de la diversité », déployée dans de nombreuses organisations.
Et pour aller encore plus loin, former managers et salariés est une démarche nécessaire.
Votre formation intra sur ce thème
MANAGEMENT INTERGÉNÉRATIONNEL
2 jours – En présentiel ou à distance
- Intégrer les caractéristiques clefs et les modes de fonctionnement des différentes générations.
- Déjouer les pièges liés aux stéréotypes et défier ses propres biais.
- Révéler les complémentarités et opportunités de collaboration entre les générations.
- Gérer efficacement les conflits intergénérationnels.
Transmettre
Miser sur la collaboration intergénérationnelle, c’est garantir la transmission. Comme dans les familles, les personnes plus seniors en entreprise ou celles qui ont une ancienneté importante sont bien placées pour perpétuer la culture d’entreprise et poursuivre la communication des valeurs. Pourquoi ne pas s’appuyer sur ces personnes pour créer des duos de tutorat intergénérationnel pour les nouveaux arrivants dans l’entreprise ? Ainsi, on favorise le lien intergénérationnel dès le départ.
Le mentorat inversé est un autre dispositif précieux pour la collaboration intergénérationnelle. Il consiste à mettre en relation un collaborateur jeune ou junior avec un collaborateur plus expérimenté, souvent plus âgé ou hiérarchiquement plus élevé, dont il devient le mentor. L’objectif est de favoriser l’apprentissage, notamment sur des sujets où les jeunes générations peuvent être plus avancées, tout en créant du lien intergénérationnel. Même si le principe du mentorat inversé repose sur une transmission ascendante – du junior vers le senior – il évolue souvent vers une relation d’apprentissage mutuel.
Par exemple, AXA France a mis en place ce type de dispositif il y a quelques années déjà.
Faire collaborer
Enfin, au-delà des aspects périphériques du travail, il est essentiel de garantir un mélange des générations au niveau des équipes, des projets et des groupes de travail. Cela implique un recrutement diversifié, mais aussi des mesures pour s’assurer que, peu importe leur âge, tous les collaborateurs se sentent inclus dans l’entreprise.
La collaboration intergénérationnelle est de plus en plus reconnue comme un défi, mais aussi comme un atout pour les organisations. Ce thème a même amené la création de Vivagen, « Le premier événement dédié à l’inclusion et à la diversité générationnelle » qui a eu lieu le 29 avril 2025. Sponsorisée par l’entreprise Adobe, cette initiative illustre à quel point la question des relations entre générations est désormais au cœur des enjeux RH : attractivité, fidélisation, transmission des savoirs, innovation… Miser sur la complémentarité des âges, plutôt que sur leur opposition, permet de construire des environnements de travail plus inclusifs, plus agiles et plus durables.