La protection des représentants : dernières jurisprudences sur le sujet

Les représentants du personnel ont pour mission de porter la parole des salariés devant la Direction. A ce titre, il est probable que certains échanges ne soient pas appréciés. Et afin de leur offrir une certaine liberté dans l’exercice de leur mission, le législateur leur a conféré un statut spécifique et notamment une protection. Celle-ci fait l’objet de nombreuses précisions dans la jurisprudence et pour en analyser les contours, il devient alors indispensable de se pencher sur les derniers arrêts en date.

Cet article a été publié il y a 1 an, 10 mois.
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La protection des représentants : dernières jurisprudences sur le sujet

La protection des représentants : les bases légales

Les représentants du personnel sont susceptibles de s’opposer à l’employeur et ils s’exposent particulièrement à des représailles de la part de la Direction. En effet, ils pourraient faire l’objet de sanctions disciplinaires sans fondement. Alors pour qu’ils puissent assurer sereinement les missions de leur mandat, mais aussi pour rassurer les salariés qui souhaiteraient s’engager dans cette voie, le législateur leur a fourni un statut protecteur. Ce statut est exceptionnel et ne profite qu’aux représentants de salariés.

Les salariés concernés par cette protection sont divers puisqu’il peut s’agir des membres du CSE, des représentants de proximité mais aussi les représentants désignés par une organisation syndicale, tel que les délégués syndicaux ou encore les représentants de section syndicale mais aussi les salariés mandatés par une organisation syndicale pour la négociation d’un accord spécifique ou les représentants syndicaux au CSE…  Mais cette protection s’étend aussi à des salariés qui ne possèdent pas de mandat, comme les candidats aux élections professionnelles ou encore ceux qui demanderaient à l’employeur l’organisation  des élections professionnelles. De même, certains salariés exercent des fonctions de représentation des salariés à l’extérieur de l’entreprise et à ce titre, ils bénéficient aussi d’une protection spécifique. Il s’agit par exemple du défenseur syndical ou encore du conseiller prud’homme…

L’article L.2411-1 du code du travail propose une liste exhaustive des salariés concernés.

Une question se pose : comment l’employeur peut-il mettre en œuvre un régime protecteur s’il ne sait pas que le salarié est détenteur d’un mandat ? Tel est le cas des salariés qui exercent leur mandat à l’extérieur de l’entreprise. Le Conseil Constitutionnel s’est positionné sur le sujet et a précisé que le salarié protégé peut se prévaloir du statut protecteur à la condition d’ avoir informé son employeur de son mandat au plus tard lors de l’entretien préalable au licenciement (Cons. const. 14 mai 2012, no 2012-242 QPC).

En fonction de la catégorie à laquelle on relève, la durée de cette protection varie. Par exemple, les candidats aux élections professionnelles jouissent de cette protection pendant 6 mois suite à l’envoi des listes de candidatures à l’employeur. De même, le salarié ayant demandé à l’employeur d’organiser les élections au comité social et économique bénéficie d’une protection de 6 mois. Cette durée court à compter de l’envoi à l’employeur de la lettre recommandée par laquelle une organisation syndicale a, la première, demandé ou accepté qu’il soit procédé à des élections (article L.2411-6 du Code du travail). Un délégué syndical, quant à lui, bénéficie d’une protection tout au long de son mandat mais aussi les 12 mois suivants la date de cessation de ses fonctions.

La protection, telle qu’elle est prévue dans le Code du travail, est mise en œuvre pour une rupture du contrat de travail, que ce soit pour un licenciement dans le cadre d’un CDI (article L. 2411-1 à L. 2422 du code du travail) ou encore lors d’une rupture conventionnelle (article L. 1237-15 du Code du travail). Mais cette protection joue aussi lors d’un transfert partiel d’entreprise ou d’établissement (article L. 2414-1 du code du travail). Une liste est proposée par le législateur dans divers articles du Code du travail.

 

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À noter : En cas de transfert d’entreprise, deux situations se présentent : quand le transfert est total, aucune autorisation préalable est nécessaire. Par contre, lorsque le transfert est partiel, l’autorisation est nécessaire et l’inspecteur vérifiera alors si le salarié ne subit pas une mesure discriminatoire.

Dans un des cas visés par la loi, la procédure nécessite une autorisation de l’inspecteur du travail. Ainsi, un employeur qui souhaite licencier un salarié protéger doit, dans un premier temps, le convoquer à un entretien préalable à une sanction pouvant aller jusqu’au licenciement. A l’issue de l’entretien, il est courant d’entendre qu’une consultation du CSE est indispensable. Or, cette consultation n’est pas nécessaire dans toutes les situations. Les juges ont dû préciser clairement les cas nécessitant l’information consultation du CSE.

De plus, le Code du travail prévoit aussi que le licenciement de tout salarié protégé nécessite une autorisation exceptionnelle de l’inspecteur du travail. Par exemple l’article L. 2411-3 du code du travail indique que le licenciement d’un délégué syndical ne peut intervenir qu’après autorisation de l’inspecteur du travail. Dans ce cas, l’inspecteur du travail a deux possibilités : il statue directement suite à la demande de l’employeur, soit il statue après que le CSE ait rendu un avis sur le projet de licenciement.

 

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À noter :
L’inspecteur du travail va vérifier que la décision de l’employeur a correctement respecté la procédure et notamment la réalisation d’un entretien préalable mais il va aussi s’assurer que le motif du licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse. En effet, le motif invoqué doit reposer sur des faits suffisamment graves pour justifier une rupture du contrat de travail. Tel est le cas aussi lors d’un licenciement pour motif économique. Dans ce cas, il vérifie par exemple que le salarié bénéficie d’un reclassement, au même titre que les autres salariés dans l’entreprise.
De plus, l’inspecteur vérifiera aussi que la décision de l’employeur ne repose pas sur un motif discriminatoire. Par exemple, il convient de vérifier que la mutation n’a pas pour objectif inavoué d’éloigner le salarié.
Enfin, l’employeur garde toujours la possibilité de ne pas autoriser le licenciement s’il estime que le départ du salarié nuirait par exemple à la représentation des salariés.

Si l’employeur obtient cette autorisation, il peut alors procéder à la notification du licenciement.

Ainsi, la protection des représentants ne les soustrait pas au pouvoir disciplinaire de l’employeur – notamment lorsqu’il exécute les missions prévues à son contrat de travail. En effet, l’employeur peut très bien exercer son pouvoir disciplinaire et au vu de ce qui vient d’être présenté, l’inspecteur n’a pas à intervenir pour une sanction différente du licenciement. Et, pendant l’exécution de son mandat, un salarié protégé ne peut pas être sanctionné pour des propos tenus à l’encontre de l’employeur, excepté si ces propos sont, par exemple, diffamatoires ou constitutifs d’un abus (Cass. Soc. 11 décembre 2019 n°18-16713)

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Une protection encadrée par les juges

Les juges ont proposé un cadre bien plus large à cette protection. Ils ont déjà étendu les situations visées par la protection en indiquant que d’autres situations que le licenciement. Il peut s’agir par exemple :

  • D’une modification d’un élément essentiel du contrat de travail. Les juges ont établi déjà plusieurs années que l’employeur ne peut imposer une modification de son contrat de travail au salarié protégé. Le refus du salarié ne pourra pas entrainer d’office un licenciement. Cette règle suit celle communément applicable à l’ensemble des salariés. Ainsi, en l’absence de clause de mobilité, un employeur ne peut imposer une mutation Paris-Marseille à un salarié. L’accord du salarié est nécessaire.
  • D’un simple changement des conditions de travail. Dans ce cas, la règle habituelle prévoit que l’accord du salarié n’est pas obligatoire à la mise en œuvre de la mesure. Tel est le cas d’une mutation dans une zone géographique que les juges précisent régulièrement. Posons qu’une mutation dans un rayon de 50 km autour du lieu d’habitation rentre dans la catégorie des simples changements des conditions de travail. Dans ce cas, le refus du salarié peut justifier un licenciement pour faute grave. Lorsque le salarié bénéficie d’une protection, l’inspection du travail doit être sollicitée. L’inspecteur du travail peut alors décider que le refus du salarié d’accepter un changement de ses conditions de travail constitue une faute suffisamment grave justifiant la rupture du contrat de travail (Cass Soc. 10 juillet 2019 n°18-14762, Cass. Soc. 17 avril 2019 n°17-31004).

En outre, les juges ont précisé dans quel cas, la consultation du CSE était obligatoire et il est posé que la consultation du CSE doit être réalisée uniquement pour les membres du CSE, le représentant syndical au CSE ou encore pour le représentant de proximité. Mais, sauf disposition conventionnelle contraire, elle n’est, par exemple, pas obligatoire pour le délégué syndical. Le Conseil d’État vient de préciser le sort des représentants dans les entreprises de moins de 50 salariés. Il a indiqué que la consultation, lorsqu’elle s’imposait, ne concernait que les entreprises de plus de 50 salariés. Ainsi, dans les entreprises comprises entre 11 et 49 salariés, il n’est pas nécessaire de prévoir une information/ consultation (Conseil d’État, 4e-1re chambres réunies, 29.12.21, 453069).

Ainsi, les salariés dits protégés bénéficient d’une protection assez large afin de leur permettre d’exercer correctement leur mandat. Il convient de se pencher sur les différents articles du code mais aussi de vérifier les précisions prétoriennes afin d’avoir un panorama complet des règles applicables, d’autant plus que les contentieux sur le sujet peuvent coûter cher à l’employeur et nuire au climat social de l’entreprise.

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