Partager la publication "Slow working : et si travailler moins vite, c’était travailler mieux ?"
Qu’est-ce que le slow working ?
Une philosophie née du slow movement
Le slow working est une approche inspirée du slow movement, lui-même prenant ses racines dans la slow food initiée par Carlo Petrini. Dans les années 1980, ce critique gastronomique italien a voulu protester contre l’arrivée de la restauration rapide en mettant en avant les avantages d’une cuisine sourcée, préparée et dégustée avec lenteur.
Près de 40 ans plus tard, le slow se décline partout. Le slow parenting, par exemple, invite à plus de simplicité dans les moments en famille. Dans la même lignée, le slow tourism implique de se laisser porter lors de ses voyages, sans forcément chercher à tout planifier. Le fil rouge est le même : se focaliser sur l’instant présent en faisant appel à sa créativité.
Il était donc logique que le travail suive la tendance.
Travailler en conscience plutôt qu’en urgence
Entre les dizaines de notifications par jour, les coups de fil qui s’enchaînent, les réunions de dernière minute ou encore les e-mails à traiter, il peut vite être difficile de prendre du recul. Dans l’urgence, le multitâche devient la norme, mais à quel prix ? Avec un esprit brouillé et pressé, la concentration s’affaiblit, la fatigue augmente et des erreurs peuvent survenir plus fréquemment.
Le slow working n’est pas une apologie de la lenteur ou de l’inefficacité : c’est un courant qui invite à se reconnecter à ses tâches, à oublier l’immédiateté pour mieux faire le point. Travailler en conscience, c’est se concentrer pleinement sur une tâche à la fois, en y accordant toute son attention. Cela permet un meilleur contrôle et une efficacité renforcée.
Une réponse au culte de la productivité à tout prix
Dans le monde du travail, la productivité est souvent mesurée à la vitesse d’exécution ou au volume de tâches accomplies. Ce n’est pas pour rien que nous assistons depuis quelques années à une explosion de l’intelligence artificielle ou de l’automatisation : tout est fait pour pousser les entreprises à produire plus, et plus vite. Si ce schéma traditionnel est ancré dans notre société, il se retrouve aujourd’hui confronté au slow working, qui n’hésite pas à remettre en question cette logique du « toujours plus ».
La méthode slow affirme qu’un travail bien fait ne peut s’effectuer qu’en respectant le rythme humain. Il est donc fondamental de redécouvrir ce qu’est le travail en prenant son temps, en se focalisant sur les tâches importantes sans être déconcentré par l’extérieur. C’est un changement autant culturel que professionnel, mais dont les avantages sont nombreux.
Les bénéfices du slow working en entreprise
Une meilleure qualité de travail
Adopter le slow working dans la sphère professionnelle, c’est donc se donner les moyens de se recentrer sur l’essentiel. En effet, cette méthode encourage à sortir de l’exécution automatique pour redonner de la valeur à chaque tâche, même routinière. Les équipes mettent de côté les missions « parasites » pour se focaliser sur le principal, sans distraction externe susceptible de les déconcentrer.
Les avantages ? En plus d’obtenir un rendu plus abouti, les salariés gagnent en rigueur, en précision et en créativité. Cela a un impact direct sur la qualité des livrables et la satisfaction des collaborateurs et des clients. L’entreprise bénéficie d’une valeur ajoutée encore plus forte.
Un impact positif sur le bien-être mental et physique
Cette quête constante de la performance est une source majeure d’anxiété. D’après une étude menée par l’Observatoire de la Qualité de Vie au Travail en 2024, 33 % des salariés ne sont pas satisfaits de leurs conditions de travail. Plus encore, 2 salariés sur 3 signalent des problèmes psychologiques et physiques liés à leur entreprise.
Or, le slow working agit directement sur le stress subi dans le contexte professionnel. Il offre non seulement un cadre de travail plus serein et respectueux de l’humain, mais permet également de réduire la charge mentale quotidienne. Ici, plus question de se sentir dépassé : les salariés retrouvent une sensation de maîtrise et diminuent ainsi les risques de burn-out et de turn-over. C’est un pas de plus vers une amélioration de la santé psychologique en entreprise.
Une productivité durable
Le slow working ne signifie pas perdre en productivité. D’ailleurs, la traduction la plus adéquate de ce terme ne serait pas « travail lent », mais plutôt « travail doux ». Ici se joue un vrai retour à l’essentiel, avec une opposition affirmée à la fast life si répandue dans le quotidien professionnel. La qualité est plus importante que la quantité : il s’agit de produire mieux, et pas moins.
Une enquête réalisée par l’université de Warwick, au Royaume-Uni, prouve qu’un salarié heureux augmente sa productivité de 12 %. Ainsi, en mettant en place une méthode de slow working efficace, qui permet une meilleure conciliation de la vie personnelle et professionnelle, il est facile d’augmenter le niveau de performance sans épuiser les équipes. Mais pour cela, encore faut-il apprendre à gérer son temps.
Comment adopter le slow working au travail ?
Changer son rapport au temps et aux urgences
Remettre en question sa perception du temps est un premier pas vers le slow working. Dans un quotidien où tout semble urgent et prioritaire, il est indispensable d’apprendre à faire le tri, à discerner le « vrai urgent » du « faux urgent ». Cela ne se fait pas du premier coup et plusieurs techniques peuvent être appliquées pour faciliter cette transition.
Par exemple, il est possible de mettre en place la matrice d’Eisenhower. Derrière ce nom emprunté à l’ancien président des États-Unis, réputé pour sa gestion militaire rigoureuse, se cache un tableau pensé pour hiérarchiser les tâches. Il se divise en quatre parties :
- Important et urgent : à traiter maintenant
- Important mais pas urgent : à planifier
- Urgent mais pas important : à déléguer
- Pas important et pas urgent : à reporter ou à abandonner
Bien sûr, cette matrice est à adapter en fonction des besoins, mais elle reste une manière simple de gérer ses tâches en fonction de leur priorité. Dans le même registre, prendre le temps d’organiser ses idées ou de faire des to-do lists peut s’avérer utile : l’important ici est de savoir où aller, sans se laisser dicter son rythme par les notifications ou les demandes extérieures.
Créer des rituels de concentration
L’organisation des tâches passe également par la mise en place de rituels de concentration. C’est un élément clé du slow working – se créer des espaces mentaux propices à la réflexion et au travail profond pour renforcer sa productivité. Mais comment faire, surtout à l’ère des open-space où rester concentré peut s’avérer être un parcours du combattant ? Il existe notamment des formations pour aider les salariés à se réapproprier l’espace et à être performant, même dans un bureau commun.
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1 jour – En présentiel ou à distance
- Adapter son mode de travail aux espaces dynamiques comme les open spaces et le flex office.
- Maintenir sa concentration dans un environnement de travail ouvert en gérant mieux le bruit et la promiscuité.
- Améliorer la circulation de l’information et la collaboration pour une meilleure productivité.
- Utiliser les dernières avancées en neurosciences comportementales pour mieux vivre et travailler en espace partagé.
- Élaborer une charte du vivre ensemble pour favoriser une ambiance de travail apaisée.
D’autres solutions ont prouvé leur efficacité. Par exemple, la méthode Pomodoro, développée par Francesco Cirillo à la fin des années 1980, consiste à travailler pendant 25 minutes avant de prendre une pause de 5 minutes. Chaque session permet de rester concentré à 100 % sur une tâche – à condition, bien sûr, de s’y tenir avec fermeté. Le casque, si autorisé, est idéal pour s’isoler du bruit tout en restant joignable si besoin.
Il est également intéressant de trouver les moments de la journée où l’on est le plus productif. Certaines personnes préfèrent s’occuper des tâches complexes le matin, en arrivant au bureau, tandis que d’autres sont plus concentrées l’après-midi. Dans tous les cas, une fois repérés, ces slots peuvent devenir de véritables créneaux où l’on avance efficacement sur ses missions.
Encourager une culture d’entreprise plus humaine
Bien sûr, le slow working ne peut s’installer durablement que si l’environnement professionnel le permet. Ce n’est pas une démarche individuelle mais bien un engagement collectif : il est donc fondamental que la culture d’entreprise suive le mouvement.
Les RH ont un rôle central à jouer dans cette évolution. Comment ? En formant les managers à un leadership plus bienveillant (notamment avec l’empathie numérique), en instaurant des indicateurs de performance portés sur la qualité, en encourageant les rituels de concentration, en favorisant le droit à la déconnexion… Chaque brique posée devient les fondations d’une efficacité durable.
Et ça fonctionne : le slow working a déjà fait son chemin dans certaines entreprises françaises. C’est notamment le cas de la MAIF, qui a proscrit les réunions à toute heure ou les mails intempestifs pour éviter le surmenage. Plus encore : ils viennent de signer un accord ayant pour objectif d’apporter plus de souplesse à leurs salariés (possibilité de télétravailler jusqu’à trois jours par semaine, choix entre plusieurs formules de temps partiel avant la retraite…).
La société Michelin a également instauré la semaine de quatre jours dans certaines usines en France. L’objectif ? Favoriser l’équilibre en vie personnelle et professionnelle pour que les employés soient plus reposés et productifs.
Conclusion
Le slow working n’est pas une tendance : c’est une vraie révolution qui invite à repenser l’activité professionnelle. Freiner la cadence pour travailler mieux est un excellent moyen de contrecarrer le culte de la réactivité. En ralentissant le rythme, les entreprises investissent dans une productivité sur le long terme, où l’humain retrouve sa place centrale. Privilégier la qualité à la quantité, favoriser le bien-être plutôt que l’épuisement, prendre le temps de bien faire… Dans un monde où tout s’accélère, et si c’était ça, le vrai progrès ?