Partager la publication "Le leadership vulnérable, nouvel atout pour l’entreprise"

Comprendre le leadership vulnérable
Définition et distinctions dans le contexte professionnel
Dans la société, le mot « vulnérabilité » a longtemps été connoté négativement. Cette perception a été d’autant plus ancrée dans le monde professionnel, car souvent assimilée à de l’incompétence – comme si le leader n’avait pas les épaules pour assumer ses responsabilités.
Pourtant, ces dernières années, un vent nouveau souffle sur les entreprises avec l’émergence d’un management plus bienveillant. Ce courant laisse davantage de place aux qualités intrinsèquement humaines et fait la part belle à cette vulnérabilité qu’on s’interdisait de montrer. Et par « vulnérabilité », on entend ici exprimer ses émotions et dévoiler ses fêlures : le manager n’est plus obligé de garder cette image invincible et autoritaire qu’on attend de lui. Il a le droit de ne pas savoir, de douter, de se remettre en question.
Cela n’a pas toujours été le cas. Pendant des décennies, le modèle managérial dominant a été vertical, fondé sur le contrôle, la performance individuelle et la distance avec les équipes. Le leader était perçu comme l’unique détenteur de savoir et de vérité, presque redouté par ses collaborateurs.
L’avènement du leadership transformationnel
Dans son livre Leadership paru en 1978, le sociologue James Burnes a distingué pour la première fois deux types de management : le leadership transactionnel, basé sur l’échange et la récompense, et le leadership transformationnel, qui se concentre sur l’inspiration, la motivation et le développement pour amener les collaborateurs à dépasser leurs propres intérêts. Ce concept a ensuite été précisé par Bernard M. Bass dans les années 1980.
C’est à cette même période que le management a pris un virage plus authentique. L’exemple de Steve Jobs, cofondateur d’Apple, est parlant : il a été l’un des premiers dirigeants à mettre en place un leadership visionnaire. Instauration d’une confiance absolue avec ses collaborateurs, délégation de tâches, création d’un environnement propice à la vulnérabilité et à l’expression des compétences… Il a bouleversé les codes en prouvant qu’un dirigeant peut être à l’écoute et réussir dans sa mission.
Dans son ouvrage Radical Candor, Kim Scott pousse même plus loin cette vision du leadership : être vulnérable et bienveillant, oui, mais sans tomber dans une empathie excessive ou paralysante. Un manager qui évite le conflit par peur de blesser ou de déstabiliser ses collaborateurs risque de fuir ses responsabilités managériales, notamment en omettant de donner un feedback clair ou en négligeant la fixation d’objectifs. Le leadership vulnérable ne consiste donc pas à gommer toute autorité, mais à l’incarner avec justesse, dans un équilibre entre sincérité, exigence et humanité.
Le leadership vulnérable à l’heure des nouvelles générations
La montée en puissance des nouvelles générations sur le marché du travail, notamment les Millennials et la Génération Z, a également redéfini les attentes vis-à-vis du leadership et du monde professionnel. Sensibles aux causes sociales et environnementales, ils ne recherchent plus seulement un emploi et un salaire – ils attendent des leaders accessibles, honnêtes et capables de se remettre en question. C’est essentiel pour eux : selon un sondage Ipsos de 2024, 74 % des 18-28 ans déclarent qu’il est primordial que l’entreprise soit en accord avec leurs valeurs. Si la hiérarchie ne suit pas, alors ils n’hésitent pas à quitter l’entreprise.
Cela encourage les services RH à repositionner leurs pratiques. Face à ces nouvelles attentes, le leadership vulnérable s’impose comme une réponse adaptée, connectée à son époque.
Les bénéfices concrets du leadership vulnérable
Instaurer un véritable climat de confiance
La première force du leadership vulnérable réside dans sa capacité à favoriser un climat de confiance profond et durable. Lorsqu’un manager admet ses doutes ou ses maladresses, il envoie un signal fort : l’erreur est permise, la parole est libre, et chacun a le droit de ne pas tout maîtriser.
Cette posture réduit la peur du jugement, de l’échec et des sanctions, en plus d’encourager les collaborateurs à s’exprimer quand ils en ressentent le besoin. Ainsi, les équipes se sentent en sécurité psychologique, un facteur essentiel de la performance collective en entreprise. En assumant sa part d’humanité, le leader crée les conditions d’un dialogue ouvert et propice à la coopération.
Favoriser la créativité en entreprise
Contrairement aux idées reçues, la vulnérabilité est un moteur de performance. Une culture où l’erreur est perçue comme une opportunité d’apprentissage, et non comme une faute, libère la créativité : les équipes osent davantage expérimenter, proposer de nouvelles idées et trouver des solutions innovantes. Le leadership vulnérable, en valorisant l’authenticité et l’expérimentation, libère les prises d’initiative et encourage chacun à sortir du cadre sans craindre le jugement.
Cela représente d’ailleurs un parfait contre pied à l’engrenage de l’IA, qui tend à uniformiser les tâches et les processus et à rendre les entreprises similaires, sans aucune nuance. Opter pour la créativité, c’est se différencier des concurrents.
Améliorer le bien-être et l’engagement des collaborateurs
Lorsque les employés évoluent dans un environnement de confiance et de sécurité psychologique, leur bien-être s’améliore considérablement. Ils sont moins stressés, plus à l’aise pour être eux-mêmes, ce qui renforce considérablement leur sentiment d’appartenance. Cette atmosphère bienveillante stimule l’engagement, car les collaborateurs sont plus motivés, plus impliqués et plus fidèles à l’entreprise.
C’est d’ailleurs avéré : 88 % considèrent que la qualité de vie au travail est prioritaire (source : Qualisocial et Ipsos 2024). Un leadership vulnérable contribue ainsi directement à une meilleure rétention des talents et à une réduction du turnover, des enjeux cruciaux dans le marché du travail actuel.
Mettre en œuvre le leadership vulnérable en entreprise
Former les managers au leadership vulnérable
L’intégration du leadership vulnérable dans le monde professionnel ne se fait pas de manière spontanée – elle nécessite un accompagnement structuré, et la formation des managers est une étape clé. Ces formations doivent d’abord viser à déconstruire les idées reçues selon lesquelles la vulnérabilité serait une faiblesse, en mettant en lumière ses réels bénéfices en termes de confiance et de performance.
Votre formation sur ce thème
MANAGEMENT ET QVT
2 jours – En présentiel ou à distance
- Agir conjointement sur la performance et le plaisir au travail.
- Trouver des solutions originales et concrètes pour améliorer l’efficacité tout en respectant les personnes.
- Développer la coopération et le bien être au travail.
- Promouvoir une culture de reconnaissance et de valorisation au sein de l’équipe.
Développement de l’intelligence émotionnelle, communication claire et empathique, gestion des émotions, techniques de feedback bienveillant mais direct… Il s’agit ici de donner aux leaders les outils pour assumer cette nouvelle posture sans fragiliser leur autorité. La qualité de vie au travail n’en sera que plus renforcée.
Développer son empathie
Le leadership vulnérable en entreprise est indissociable de l’empathie. Sans cette capacité fondamentale à se mettre à la place de l’autre, à comprendre et à partager les émotions de ses collaborateurs, la vulnérabilité du leader risquerait de sonner faux ou d’être mal interprétée.
Cette empathie peut d’ailleurs se traduire par plusieurs formes : en présentiel, grâce à la manière de s’exprimer ou au ton employé, mais également en numérique, avec des émojis, des tournures de phrases choisies ou le temps de réponse.
Si un employé, par exemple, ne parvient pas à effectuer une mission à temps, il est préférable de lui demander s’il a eu des difficultés au lieu de déverser sa frustration sur lui. C’est en se mettant à sa place que le leadership vulnérable devient central.
Apprendre à se montrer humain sans perdre en légitimité
Être un leader vulnérable ne signifie pas tout dire, ni tout montrer : c’est apprendre à partager ce qui est utile, dans un cadre professionnel, pour renforcer la cohésion et la confiance dans l’entreprise. Admettre ses incertitudes et ses erreurs est indispensable pour renforcer son humanité et sa crédibilité, car cela témoigne d’un courage dont les collaborateurs peuvent s’inspirer.
En revanche, cela ne dispense pas de prendre des décisions claires, de fixer un cap et d’inspirer ses employés. Un excès de vulnérabilité mal maîtrisé peut désorienter les équipes ou donner l’impression d’un manque de vision. La légitimité du dirigeant et des RH repose alors sur leur capacité à conjuguer écoute et décision. Autrement dit, à incarner une autorité alignée avec les valeurs qu’ils défendent. Il faut donc trouver le juste équilibre.
Conclusion
À l’heure où le monde professionnel ne cesse d’évoluer vers plus de bienveillance, le leadership vulnérable s’inscrit comme un puissant levier pour inspirer la confiance. En acceptant de se montrer humains, les dirigeants et les ressources offrent à leurs collaborateurs un espace sain,
dans lequel il est possible de s’exprimer sans crainte. Ils renforcent également leur légitimité et bâtissent une culture d’entreprise plus sincère et valorisée.